Théo ANANISSOH

Un reptile par habitant



« La sueur commençait à perler sur son front.
- Mais pourquoi ? s'exclama-t-il de nouveau. Je ne suis en rien concerné par cette affaire ! Je ne sais vraiment pas pourquoi elle s'obstine à m'y impliquer ! Je ne connais pas cet homme. Je ne l'ai même pas tout de suite reconnu ! 
»

Narcisse aime beaucoup les femmes. Trop, peut-être… et cela lui vaut d’être embarqué dans une angoissante aventure !

Alors qu’il fait l’amour avec Joséphine, son téléphone portable sonne. Il répond, se rhabille en hâte et file à toute vitesse. C’est Edith, une autre de ses maîtresses, qui l’a appelé.
Quand il arrive chez elle, il trouve le corps du colonel Katouka dans le salon. Edith a de nombreux amants dans la ville, souvent plus riches ou plus puissants que Narcisse, et le chef d’état-major adjoint de l’armée était l’un d’eux. La jeune femme explique qu’elle est allée prendre une douche et qu’en revenant dans le salon, elle l’a trouvé comme ça, poignardé, baignant dans son sang. Que faire ?
Narcisse regrette surtout d'être mêlé à cette histoire ?
« Édith, cette affaire me dépasse. Elle m'écrase. Je ne suis qu'un prof de lycée. En plus, certaines personnes savent sans doute qu'il y a eu quelque chose entre nous. Je ne peux donc pas être concerné par cette affaire. Je ne peux pas, Edith. Tu dois me comprendre. On ne doit même pas savoir que je suis venu ici cette nuit, sinon on ne va plus chercher le coupable. Aux yeux de tous, ce sera moi. »

Edith décide d’appeler un autre amant, le sous-préfet.
Narcisse et le sous-préfet embarquent le corps dans la propre voiture du colonel pour l’enterrer dans les bois. Puis, ils abandonnent le véhicule près de la frontière d’un pays proche où l’on pourra penser que le colonel s’est enfui…
Dans ce pays d’Afrique (non précisé), derrière l’assassinat d’un dignitaire du régime, on imagine facilement des rivalités, des complots, des menaces de coup d’état ou de rébellion…

Pendant quelques jours, il ne se passe rien. Silence radio. « - Qu'ils n'en parlent pas (Joséphine désigna le téléviseur) ne prouve rien. Ils ne donnent jamais les vraies informations, de toute façon. »

Narcisse est paniqué. Il s’attend à tout instant à être arrêté. Mais cela ne l’empêche tout de même pas de revoir ses maîtresses et de faire la cour à une de ses élèves, Chantal. « Elle était consentante, mais affectait la réticence, comme toute fille qui se soucie de sa réputation. Elle n'avait cependant pas hésité à écrire au crayon le numéro de son portable sur un coin de sa copie. »

Au lycée, Narcisse fréquente aussi Julius Zupitzer, le professeur d’histoire-géographie dont les réflexions sur la situation politique du pays l’intéressent. C’est de lui que, peu à peu, viendra l’explication de cette étrange affaire…

Un roman très agréable à lire, mélange de polar, d’humour et d’érotisme, avec quelques passages satiriques, comme la manifestation de soutien au président, la demande de pardon de la ville pour avoir été le théâtre d’un complot ou la délégation qui se termine en carnage. Quoi qu’il arrive, l’auteur promène un regard amusé sur les événements.

« Après, vous savez comme on est dans ce pays, il a été dit et raconté beaucoup de choses, des descriptions détaillées ont été faites par des gens qui, comme moi, avaient passé toute la nuit sous leur lit. »

Serge Cabrol 
(02/09/07)    



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Editions Gallimard
"Continents Noirs"
106 pages - 11,90 €








Né en 1962 en Centrafrique de parents togolais, Théo Ananissoh a suivi des études de lettres à La Sorbonne.
Il vit et enseigne maintenant en Allemagne.
Des entretiens sont disponibles sur www.afrik.com
et sur un site togolais,
www.togopages.net
Son premier roman, Lisahohé, a aussi été publié dans la collection "Continents Noirs"