Bernard ASCAL

Un cul-de-sac dans le ciel




Qu’aurais-je pensé de ce recueil si je l’avais rencontré, il y a bien des années, lorsque je pratiquais la randonnée en montagne ou le ravitaillement d’un chalet à 3000 mètres d’altitude dans les Alpes ? Il est bien possible que j’aurais ri jaune à l’humour présenté dans ce recueil : Un cul-de-sac dans le ciel de Bernard Ascal.
En effet, ce recueil fonctionne comme un carnet de marche en montagne. C’est ce qui donne force à cette prose qui se doit d’être courte puisque lors de ces virées en montagne, nous avons le souffle court. Qui dit texte court, dit des saillies percutantes pour exprimer le dos cassé, les pieds en bouillie, l’esprit qui ne peut que pensoter, etc.

Nous voici donc avec un écrivain dans un décentrement qui lui permet de nous dire ce qu’il se voit faire et, bien sûr, ce qui en est dit n’est pas une mythification de l’acte, mais une réalité plus rude, plus cocasse même, parfois, frisant le ridicule, mais toujours au plus près de l’humain. L’écriture ramenant l’iconographie du marcheur en montagne à sa réalité plus prosaïque, plus drôle et jamais méchante. Voici donc un petit extrait pour comprendre de quoi je parle :

Je croise quelques randonneuses.
Nul doute qu’en d’autres lieux ces femmes sont jeunes et belles. Ici, après plusieurs heures de marche, leurs seins, quand il leur en reste, pendent comme des outres desséchées, pareilles nos couilles.


Il est vrai que les rapports sociaux changent quand nous sommes en montagne, on se sourit quand on se rencontre, parfois on se renseigne, toujours, si le besoin est là, on s’entraide.

Deux randonneurs se croisent au-dessus de deux mille mètres. Ils se saluent et même, charmante coutume, se sourient ou plus exactement, s’offrent, en raison de la fatigue, un rictus.

Ces deux-là se croiseront quelques mètres plus bas sans se voir et se feront la gueule au mieux, dans les vallées, tout au long de l’année.


On sourit, on rit même, on s’y reconnaît et, nonobstant, nous rions de nous-mêmes. Au final on vient à se demander ce que l’on cherchait alors dans ces randonnées.
Je suis sorti de ce recueil très enjoué car Bernard Ascal ne nous laisse aucun répit dans le décentrement qu’il opère. Tout ce qui est dit est souvent plein d’humour et juste, percutant. On le suit comme faisant partie de la cordée et on revisite ce vécu d’il y a tant d’années. Même le minimalisme des dessins qui accompagnent le texte concourent à la jouissance de lecture. Si jamais le pied ne s’est posé sur une pente de montagne, on y trouvera autant de plaisir à se moquer gentiment de ces fous de montagne qui nous assènent leur passion quand nous les rencontrons. Montagnard ou pas, le plaisir est vraiment grand à lire ce recueil, alors ne vous en privez pas.

Gilbert Desmée 
(29/11/08)    



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Poésie










Editions Rhubarbe

60 pages - 6,50 €



www.editions-rhubarbe.com






Bernard Ascal




Bernard Ascal a mis en musique et chante le Cahier d'un retour
au pays natal
d'Aimé Césaire




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