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Caryl FÉREY, L'âge de pierre


L’âge de pierre, c’est soixante pages de souvenirs, vrais ou inventés, d’un adulte qui se revit adolescent à ses années collège. Le résultat est à la fois drôle, touchant, nourri de références musicales ou sportives et de détails qui nous plongent avec un peu de nostalgie et beaucoup de tendresse au début des années 80.

Il nous y parle avec humour de lui-même « il faut dire que j’ai toujours été terriblement trop petit, ne me demandez pas de vous attraper le pot de confiture dans le placard, c’est niet technique ; pas de la mauvaise volonté pourtant, mais un je ne sais quoi de pas bien rapide à pousser qui fait qu’au final on a l’impression qu’il en manque un morceau » et du couple infernal qu’il faisait alors avec son grand frère « il me faisait peur ce con-là, avec ses bras musclés, les muscles étaient chez lui un membre permanent tant ils ont toujours été surreprésentés, c’était pour lui comme des poumons disséminés aux quatre coins de son corps nerveux, et qui l’aidaient à respirer… »

Mais, ce gamin-là, un peu seul et oublié lors de la distribution des armes de choc, est un malin. Transformant sa gentillesse et ses faiblesses en atout, il s’y entend fort bien à séduire son monde, à passer entre les gouttes acides de la vie et à croquer tout plaisir qui passe à sa portée. « Ce qui est pratique avec les filles quand on est un petit renard, c’est qu’elles ont vite fait de vous confondre avec un petit chat. […] Les filles me prenaient dans leurs caresses, disaient tout le ronron qu’elles pensaient de moi et me cajolaient longue tendresse comme leur chaton. Renard, je tendais le cou ».

Même si le quotidien d’un être chétif face à une force de la nature est parfois difficile et que certains s’y entendent à merveille pour vous plomber magistralement « Efféminé ? avait répondu la professeur de français à un élève qui avait posé la question. C'est-à-dire qui a les traits fins, féminins… comme votre petit camarade par exemple. Elle aurait aussi bien pu m’écarter les fesses devant la classe ; la sadique eut beau essayer de se rattraper, j’étais catapulté majorette jusqu’à la fin de mes jours, risée et quolibets. », ce gamin-là a suffisamment d’énergie, d’appétit et d’habileté pour franchir les obstacles du parcours sans dommage.

Au final, on se régale de cette spontanéité charmante, de cette sensibilité pudique.
La liberté de ton, l’humour ravageur du narrateur positionnent le récit sur le fil entre émotion et légèreté. Le résultat, chaleureux comme des confidences de fin de soirée entre amis, sonne juste et nous pince le cœur à coup sûr.

Le lecteur se laisse d’autant mieux séduire que, derrière la facture très simple du récit, se cache une écriture travaillée qui sait adroitement jouer de l’alternance entre de petites phrases courtes, énergiques comme des coups de poing et d’autres étonnamment longues qui traduisent fort bien la confusion des sentiments et l’inquiétude de ce garçon entre enfance et age adulte, entre cocon maternelle, univers du jeu et brutalité de la vie extérieure. Des incursions poétiques aussi, en cadeau, comme dans ces dernière lignes : « Mon frère m’a aiguisé comme un silex ; depuis entre la combustion et l’étincelle, je consume les fées dégringolées et le vent comme autant de miracles improvisés…. »
Un jeune auteur à suivre avec attention, un réel plaisir à s’offrir un soir de blues.

Dominique Baillon-Lalande 



Après la Lune / La maîtresse en maillot de bain


Jean-Jacques Reboux est un homme obstiné. Après l’aventure des éditions Canaille (1992-1998) puis Baleine/ le Poulpe avec Jean-Bernard Pouy, il se jette à nouveau dans les eaux éditoriales avec la création de Après la lune.
Nouvelle maison d’édition, tournée vers le polar avec la collection "Lunes blafardes" mais aussi, vers l’intimité et la tendresse, avec de courts récits autobiographiques écrits par des auteurs de noire mais pas uniquement, regroupés sous l’amusant titre générique "La maîtresse en maillot de bain".
"La maîtresse en maillot de bain" est la collection des "petits arrangements avec l’enfance". « Elle s’appuie sur l’instantané d’un souvenir transfiguré, un rêve de gosse fantasmé, un secret, cassure fondatrice ou simple coup de canif dans les sentiers de l’enfance ». Inaugurée par Hervé Jaouen et Yasmina Kadhra, cette famille de petits poches inédits à destination de tous les publics s’agrandit tous les mois de deux nouveaux titres. Dominique Sylvain, Jean-Jacques Reboux, Sigmund F. ont donc suivi, puis Caryl Férey, à qui cette aventure va comme un gant.



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Lectures






Editions Après la Lune
Collection "La maîtresse
en maillot de bain"

64 pages - 6 €




http://apreslalune.free.fr/ficheFerey.html

Né en 1967 à Caen, Caryl Férey a passé son enfance en Ile-et-Vilaine. Il a beaucoup voyagé, notamment en Nouvelle-Zélande, et vit aujourd'hui à Paris. Il a publié quatre romans noirs dont Plutôt crever (Série Noire), Haka ! (Folio policier) et Utu (Série Noire), récompensé par les Prix Michel Lebrun, Sang d'encre et Polar SNCF 2006.



Il écrit aussi des pièces radiophoniques pour France Culture, des chansons pour des groupes rock/électro et des romans pour la jeunesse.



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