Serge FILIPPINI


Deux testaments

Sacha Rozner nous raconte toute l’histoire de sa famille. Ils sont juifs et doivent fuir en zone libre au moment de l’occupation lors de la dernière guerre.

Enfant, il a jeté au feu son livre de prières et ne va pas suivre l’enseignement du rabbin Edelman à l’insu de ses parents. Il ne sait pas encore tout à fait quelle est la portée de son geste mais il va se définir comme athée à l’adolescence et à l’âge adulte. Il orientera ainsi sa vie même si l’empreinte de la religion le hante toujours. Son père est un religieux convaincu qui veut continuer à mener ses affaires malgré tout. Ses parents sont coiffeurs.

Nous suivons le parcours de cette famille en temps de guerre qui va rencontrer l’horreur et la solidarité puisqu’elle échappera aux rafles et à l’extermination. Chacun selon sa personnalité va vivre cette terrible période. Sacha est très lié avec l’un de ses oncles, Jack, athée, communiste et résistant et avec l’autre, Mickey, qu’il considère comme un frère. Sacha est adolescent, au moment de la guerre. Il va rencontrer Ultima, une jeune fille dont il tombe amoureux mais qu’il ne reverra que des années après la guerre.

Sacha est un personnage qui, toute sa vie, se questionne sans cesse, sur la religion, sur les motivations qui poussent à devenir résistant, sur l’amour, sur le sens à donner à sa vie, sur la culpabilité, sur la vengeance…
« Je ne tomberai pas dans le laid mensonge qui consiste à prétendre que je n'étais plus moi-même lorsque je quittai les Bons-Enfants. Quand ne sommes-nous plus nous-mêmes? Pourquoi n'aurais-je plus été moi-même? Parce qu'une femme s'effaçait de mon avenir? Parce que j'avais porté les armes à quinze ans? Parce que les nazis avaient exterminé six millions de Juifs ? Parce qu'on m'avait empêché de faire du théâtre, peut-être ! Quels arguments ridicules. La panne de conscience, la perte du libre arbitre, l'action accomplie sous le commandement d'une volonté extérieure : je n'ai jamais cru une seule minute à ces âneries.
En vérité, je ne me sentis peut-être jamais à ce point Sacha Rozner que ce jour-là, quand je roulai jusqu'au village indiqué sur le carton de Simon Vidal.
 »

C’est un roman passionnant avec un point de vue original et critique sur la religion même si celle-ci habite les personnages malgré eux. Le rythme et le suspense sont maintenus tout au long du roman avec une écriture fluide au service de cette histoire familiale imprimée des évènements dramatiques de l’Histoire européenne.

Brigitte Aubonnet 
(12/03/09)   



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Editions Phébus

290 pages - 20 €






Photo © Eric Toulot
Serge Filippini,
né en 1950 et philosophe de formation, est l'auteur d'une dizaine d'œuvres
de fiction.