Pascale FONTENEAU

1275 ares



Au lieu de m'engueuler avec ma femme, j'aurais mieux fait de la fermer, ma gueule. Cela restera la plus grave erreur de ma vie.

Une soirée de Noël en famille qui tourne mal et c’est le doigt dans un impitoyable engrenage pour le narrateur de ce court roman.

En réponse à des propos un peu trop coquins à l’égard d‘une belle-sœur, l’épouse congédie l’apprenti-libertin. « Ce serait mieux si on se séparait quelques jours ou quelques mois, le temps de réfléchir et de retrouver l’envie d’aller l’un vers l’autre. »
Le mari, encore émoustillé, ne se le fait pas dire deux fois et, ravi de l’aubaine, remplit ses valises sur-le-champ.

C’est ensuite que ça se gâte. « Tous les hôtels du centre-ville affichaient complet et j’ai dû me réfugier dans un établissement bas de gamme où une bande de zonards avait choisi de passer Noël. […] Vous l’aurez compris, ce n’était pas le décor dont je rêvais, j’y suis pourtant resté un mois. »
Jusqu’à ce qu’il rencontre par hasard un ancien copain de lycée, Bernard, qui lui propose de l’héberger.

Un type étrange, ce Bernard. Pas clair… Mais bon, l’un sortant le jour et l’autre la nuit, la cohabitation reste supportable. Jusqu’au jour où notre héros (littérairement parlant) fait une étonnante rencontre dans la salle de bain. « Devant moi se tenait un colosse torse nu qui se curait les dents avec un couteau de chasse ». Pas très glamour !

La vie à trois, dans ces conditions, n’a rien d’affriolant et le narrateur préfère quitter les lieux.
Justement, son ami Bernard met à sa disposition un appartement libre où il peut s’installer le jour-même.
Un rouage de plus dans l’engrenage. Il aurait dû s’enfuir, retourner chez sa femme, chez sa mère (qui lui téléphone tous les jours) ou n’importe où ailleurs, mais il accepte l’offre de Bernard et emménage dans un logement de 1275 ares où il retrouve enfin la solitude.

Pas pour longtemps ! L’immeuble est contrôlé par un gardien plus qu’inquiétant et le nouveau locataire n’est pas au bout de ses surprises…

Cette descente aux enfers à laquelle on assiste de chapitre en chapitre nous est contée par un narrateur qui se préoccupe régulièrement de la qualité de notre écoute : « Je déteste les bavards. Rien ne m'agace plus que les moulins à paroles qui déversent à la tonne des mots sans intérêt. Si vous êtes comme moi, n’hésitez pas à me le faire savoir. Pour des raisons personnelles, je ne peux pas m'arrêter, mais je ne vous reprocherai pas de me laisser là et d’aller faire un tour. Ou de sortir fumer une cigarette. Ou même de fermer les yeux et de vous endormir. Franchement, ne vous gênez pas pour moi, si nécessaire je vous ferai un petit résumé. Vraiment ? Très bien, poursuivons alors. »

Mais est-ce bien au lecteur qu’il s’adresse ? Ce n’est pas moi qui vous le révèlerai et cela vous donne une raison de plus d’aller jusqu’au bout de cette ténébreuse affaire.

Serge Cabrol 
(11/06/08)    



Retour
Sommaire
Noir & polar








Editions La Branche
Suite Noire
90 pages - 10 €








Pascale Fonteneau,
née en France, habite en Belgique depuis l'enfance. Elle est l'auteur d'une bonne quinzaine de livres dans la Série Noire,
au Masque, ou ailleurs...