Jean FOUCAULT

Quand la mère se retire



J’aimerai tout d’abord dire combien j’ai trouvé sensible et belle la préface de Pierre Garnier pour accompagner ce recueil qui exprime les pensées qui assaillent un fils lors de la route qui le mène jusqu’à la mère en fin de vie.
Le recueil se divise en deux parties : Voyage vers la mère (De la nuit vers le jour) et Veilleur (Jour et nuit).
Si l’itinéraire (Amiens - Le Mans) est dit de façon subtile, nous le déduisons rapidement par un poème dédié à la chanteuse Barbara :

Il pleut sur Nantes.
Il pleut sur Amiens.
Il pleut sur Le Mans.
Donne-moi la main.

Ce n’est pas le ciel de Nantes
Qui rend mon cœur chagrin.

Très vite on se sent au volant d’une voiture, sous la pluie, la radio fonctionne (flash info, musique, etc.) et conducteur solitaire vers cette mère qui se meurt. Moments de trouble, moments d’accalmie, nous suivons ces instants de fragilité d’un être qui sent déjà l’absence, la réalise et ne la réalise pas à la fois. Le pied parfois se fait lourd sur l’accélérateur :

Je roule roule roule
Ma mère est à la place du mort
« Pourquoi pleurer me dit-elle ? »
« Ne veux-tu pas changer de place, lui dis-je ? »
« Mais non je suis très bien comme ça. »

Je regarde ses chaussons
Bleus
Et le ciel
Gris.

Quelque chose n’est pas à sa place
Pensai-je fugitivement.

J’appuie sur l’accélérateur.

« Pas si vite me dit-elle
Pas si vite
Je n’ai pas le temps d’apercevoir
Le paysage. »
« Le paysage le paysage ! Parlons-en !
On a bien autre chose en tête que le paysage, aujourd’hui.
Tu ne trouves pas ?

Et puis je m’arrête.
Pourquoi contrarier
Celle qui
Occupe la place
Du mort ?



Ma cage de Faraday
Traverse l’orage.
Je tourne mon visage :
Plus personne
À côté de moi.

Jean Foucault nous fait partager tout ce qui lui arrive pendant cette route de la nuit vers le jour, ses pensées, son imaginaire, ses réflexions sur la mort. Il le fait en une poésie simple, subtile et sensible, sachant nous faire entendre cette détresse qui vous assaille dans cette situation où l’on se trouve quand on sent que son parent ne va plus être là.

La deuxième partie est tout aussi sensible et subtile. Elle se termine par un court poème qui dit tout :

On vient à l’aube relever le veilleur
(car il y a donc encore une aube – ainsi va la vie) :

« Tu travailles ? »
« Oui je commence
Le travail de deuil. »

Merci à Jean Foucault pour ce recueil où il sait si bien nous dire ces moments de douleur, de trouble, d’étrangeté ressentie, de résurgence du passé, de regrets, de désirs, où parfois plusieurs sensations se mélangent et provoquent quelque confusion. Le voyage ne s’arrête pas au Mans, car le voyage va vers le vide. Ceux qui ont vécu ce genre de situation retrouveront cet étrange moment qu’est la perte d’un parent.

Gilbert Desmée 
(12/08/08)    



Retour
sommaire
Poésie









Editions Soc & Foc
96 pages - 15 €








Pour visiter le site
de Jean Foucault :
www.jean-foucault.fr