Perdre un être cher est terrible. Perdre un enfant est inadmissible. Perdre un enfant de six ans, voilà ce qui arrive à Naples à Matteo et Giuliana.
Pris dans une fusillade, Matteo et son fils Pipo se couchent à terre mais une balle perdue atteint Pipo. La vie s’arrête pour lui mais aussi pour ses parents.

Comment vivre après un tel drame ? Comment accepter cette réalité ? Le couple ne l’accepte pas. Ils se séparent. Giuliana fixe des exigences à son mari qu’il ne peut réaliser immédiatement. Elle s’enfuit pour oublier son ancienne vie.

Nous passons en alternance de 2002 à 1980, du récit d’une vengeance au récit de l’événement fondateur de cette vengeance. Nous vivons avec nos morts et nos morts vivent avec nous. La perméabilité des deux mondes existe-t-elle ?
« Les deux mondes sont perméables… Cela a été une révélation… Durant toutes les années qui ont suivi, j’ai étudié la question. J’ai analysé les textes. D’Orphée à Thésée. D’Alexandre le Grand à Ulysse. »

Laurent Gaudé nous révèle de très fortes symboliques, la réalité, l’imaginaire, le rêve, les mythes, les fantasmes se mêlent dans un récit poignant et haletant : « C’était la porte que l’on n’ouvre pas, celle du monde d’En-Bas où ne vont que les morts. Matteo et Mazerotti étaient arrivés au seuil des deux mondes et leurs corps d’hommes épuisés leur parurent dérisoires face à la monstrueuse éternité du bronze. »
« Chaque mort en disparaissant, emmène avec lui un peu des vivants qui l’entourent. »

Matteo n’aura de cesse de réaliser ce que sa femme lui a demandé même s’il ne peut plus le lui dire. Il va avoir la possibilité d’accéder au royaume des morts pour retrouver son fils et nous comprenons peu à peu la scène initiale du roman.
La vengeance hante les personnages fous de douleur.
Ce roman suit les évolutions que nous connaissons face à la perte d’un être cher. Il montre comment les absents vivent toujours avec nous et où se situe notre rôle pour continuer à les faire vivre.
Un roman que l’on ne quitte pas une fois commencé mais un roman qu’il est certainement difficile de lire juste après un deuil car il est lourdement chargé en émotions.

Brigitte Aubonnet 
(25/08/08)