Nous retrouvons avec un grand plaisir Hardouin cadet-Venelle, le bourreau devenu justicier dans le premier volume, Le brasier de justice, pour avoir dû admettre (et prouver) l'innocence de Marie de Salvin qu'il avait conduite au bûcher. Le fantôme de la jeune femme condamnée à tort continue de le hanter. Dieu peut-il admettre que des coupables échappent à la justice pendant que d'autres sont exécutés à leur place ?

Le sous-bailli de Mortagne, Arnaud de Tisans, a bien compris le bénéfice qu'il peut tirer des talents d'enquêteur du bourreau qui a su mettre fin à une ignoble série de meurtres d'enfants.

Cette fois-ci le sous-bailli est atteint dans sa propre famille en apprenant la mort de sa fille Henriette, religieuse dans un couvent. Son corps a été retrouvé près de l'abbaye alors qu'elle revenait d'une tournée d'aumôneurs. Une petite note nous apprend que ces "aumôneurs" sont des personnes contraintes par la loi de donner de l'argent afin de racheter leurs fautes. Régulièrement, une religieuse fait le tour des condamnés pour percevoir les sommes dues. L'argent qu'elle transportait a disparu et l'on a retrouvé la haquenée qu'elle montait à quelques toises de… sa dépouille. Crime de brigands ?

La mère supérieure a fait appel au mire (médecin n'ayant pas prononcé de vœu de célibat) qui a lui-même fait appel à un confrère très savant, Jehan Fauvel, que nous avons déjà rencontré dans une autre série de romans d'Andrea H. Japp, Les mystères de Druon de Brévaux. Pour les hommes de science, il ne fait pas de doute qu'il s'agit d'un assassinat, la jeune femme ayant été frappée à la tête avant d'être étranglée. Mais plusieurs éléments sont troublants, comme le fait qu'elle ait été agressée de face et ne se soit pas défendue, sans parler de traces étranges dans son dos...

Arnaud de Tisans et le bourreau vont reconstituer le parcours d'Henriette qui a visité trois fautifs. Le premier avait rogné sur la dîme, la deuxième avait tué une oie pendant la période de carême et le troisième, en état d'ébriété, avait uriné dans une église et insulté le curé. Est-ce l'un d'eux qui a tué Henriette ? Et pourquoi ?

Mais, parallèlement à cette enquête, Hardouin en mène une autre car la sœur de Marie de Salvin, Mahaut de Vigondin, est emprisonnée et accusée d'avoir empoisonné (enherbé, disait-on alors) son beau-père, son mari et tenté de faire subir le même sort à son fils de cinq ans. La sœur de Marie peut-elle être une empoisonneuse ? Le bourreau justicier va s'efforcer de prouver le contraire mais cette enquête ne trouvera pas sa solution ici et il nous faut attendre le prochain volume (parution prévue en octobre) pour savoir si Mahaut est vraiment coupable des crimes qu'on lui attribue…

Les romans d'Andrea H. Japp se dévorent toujours avec un grand bonheur grâce à la profonde connaissance des us et coutumes de l'époque qu'elle nous fait partager et par la façon dont elle emploie (et explique) un langage très imagé dont de nombreuses expressions sont parvenues jusqu'au français d'aujourd'hui mais souvent déformées dans leur forme ou leur sens. Une plongée dans le moyen-âge du XIVe siècle, un voyage dans l'histoire de la langue, un héros droit et juste assurant une fonction peu courante, des enquêtes passionnantes, toutes les raisons sont réunies pour se précipiter sur ces ouvrages et attendre le prochain avec impatience.

Serge Cabrol 
(11/08/12)