Karel LOGIST

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Poèmes 1988-2008



Ce recueil est un florilège de poèmes parus dans des recueils précédents : Le séismographe, Ciseaux carrés, Si tu me disais viens, Force d’inertie, J’arrive à la mer, etc. La production de Karel Logist est importante. Pour moi, Ce poète est important. Il y a treize ans j’écrivais à son propos : « Karel Logist parle de moments infimes, de voyages immobiles où l’être se révèle d’une manière rare en poésie… Dans chacune de ces miniatures, le minime rencontre le monumental à travers une écriture très travaillée ». Je continue à le penser. Ici, l’intérêt de ce florilège est de mettre en perspective des poèmes sur un même sujet parus dans des recueils différents, à des périodes différentes. Et cela fonctionne merveilleusement. Karel Logist regarde les choses à partir du même endroit et alors que cette distance (il habite de l’autre côté du fleuve). Comme le fait remarquer Francis Dannemark sur la 4ème de couverture : « Selon les heures, du jour, selon les saisons de l’année, le regard doit traverser tantôt la brume qui traîne autour de l’eau, tantôt les pluies de novembre, ou alors les mirages de l’été. Ainsi il arrive que le malheur, à cette distance, vous ait des airs de complicité, pour rien il vous tendrait la main. Et il n’est pas rare que le bonheur, avec son vieux manteau et ses pas de danse maladroits, vous lance une grimace en guise de salut ».
En fait, Karel Logist ne se moque de rien, sa poésie est celle du cœur. Voici, pour exemple, un poème que j’aime bien pour l’avoir (sous une autre forme) publié dans Sapriphage et qui en édition faisait partie du recueil Force d’inertie :

Je fais le poète à seize heures jusqu’à dix-sept heures quarante.
J’enstrophe tout ce qui me trotte par la tête sur douze pieds. Je mords mon feutre pour trouver une rime riche à vertèbres, puis couche sur le papier trois vers promis à six lecteurs (six vers écrits pour trois lecteurs si je césure l’hémistiche).
À dix-huit heures Vivi rentre et dit qu’as-tu fait de bon. J’ai fait les lits et la vaisselle, j’ai donné le bain à bébé, j’ai fait du lapin aux pruneaux, j’ai donné à boire au yucca, j’ai fait tourner l’efface-rêves, j’ai donné mon corps à la science, j’ai fait courir quelques rumeurs, j’ai fait donner de l’olifant.
Et pendant qu’elle ôte ses grolles, je versifie l’apéritif. Pendant qu’elle pose sa veste, je la poème à pleine bouche, et quand je la prends dans mes bras, je fais passer au vide-ordures mes vers poudrés comme loukoums et mes insipides pantoums.

Ou encore ce tout petit :

Tes amis
ne savent pas ton nom
ton nom secret
celui que la nuit noire
te donne quand soudain
le doute s’ouvre en deux
espace d’impuissance

Comme vous pouvez le remarquer, la poésie de Karel Logist est forte non pas par son emphase, mais par la justesse, la pertinence des mots utilisés et, par cela, des images engendrées. L’être en est particulièrement bien analysé. C’est toute la beauté de cette poésie. Allez-y ! N’ayez pas peur. Prenez le temps de vous imprégner de la poésie de Karel Logist, il vous en restera des petits moments de bonheur.

Gilbert Desmée 
(20/07/08)    



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Le Castor Astral
Collection
Escales des lettres

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