Dominique MAINARD

Je voudrais que tu te souviennes



Il faut prendre le temps de pénétrer l’univers si particulier, si dense, si riche de Dominique Mainard qui, de livre en livre, nous embarque dans son monde où le fantastique flirte avec la réalité des existences.

Une adolescente, Julide, se voit confier par sa tante Nala la responsabilité de s’occuper de Mado une vieille dame handicapée dont le père avait réalisé pour elle, quand elle était enfant, un jardin minuscule.
« Jamais elle n'avait su si son père la croyait lorsqu'elle rentrait le soir, pâle et les traits tirés, épuisée d'avoir passé toute une journée immobile et solitaire, et lui racontait son voyage. Jamais il ne l'accompagna ni ne la suivit en cachette jusqu'à la gare, pas plus qu'il ne l'interrogeait lorsque par lassitude elle rentrait avant l'heure du train, et elle finit par se demander qui, d'elle ou de lui, elle protégeait par ses mensonges. Elle voyait bien que ses photos l'attristaient. Il les regardait sans mot dire alors qu'autrefois il s'émerveillait du don qu'elle avait pour déceler la beauté. Il aurait voulu qu'elle photographie toute l'ampleur du monde, il aurait voulu qu'elle lève la tête et cesse de regarder à ses pieds, mais il ne comprenait pas qu'il l'avait condamnée à éprouver toute sa vie la nostalgie du monde minuscule au fond du jardin. »

Nala lit dans les cartes et raconte des histoires qui ne sont pas des mensonges mais aide à ne pas vivre seul. Après avoir confié Mado à Julide, elle prend un train pour finir sa vie sans témoins.

Mado perd un peu la tête, ne retrouve pas toujours son chemin, photographie les détails qu’elle voit sur le sol et un jour elle aperçoit un homme sur un toit. Elle lève enfin la tête. Julide ne comprend pas vraiment ce qui se passe. La vie de Mado est bouleversée par cet événement et elle n’aura de cesse d’observer le couvreur qui répare les danseurs de bois, de porcelaine et de fonte sur le toit d’un marché couvert.

C’est un roman d’ambiance, où circule l’amour sous des formes tout à fait originales. Les personnages sont attachants. Ils s’entraident, se soutiennent dans les épreuves, ils sont fidèles et ne s’abandonnent pas, même si exprimer ses sentiments n’est pas toujours facile. Leur univers est complexe et se déplie peu à peu pour délivrer toute leur humanité et la force de leur amour.

Nous retrouvons aussi la relation aux plantes déjà croisée dans le recueil de nouvelles Le grenadier ainsi que la présence d’un handicap, thème récurrent de roman en roman.
Dominique Mainard, de texte en texte, révèle l’humain, la grandeur des sentiments, le respect des autres, la différence acceptée sans jugement, des valeurs essentielles qu’il faut prendre le temps de préserver.

Brigitte Aubonnet 
(11/05/07)    



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Editions Joëlle Losfeld
248 pages - 17,90 €




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