Hugo MARSAN

L'assassin improbable


Ancien comédien, André vit sa retraite à Saint-Médard :
« L'âge le rendait de plus en plus intransigeant. Et il se détestait lui-même d'être devenu si irascible, si fortement affecté par la fatuité des personnages publics. Sa carrière de comédien raté, ou du moins qui n'avait pas été à la mesure de ses capacités, l'avait évincé de la cour des grands et relégué dans une retraite amère. Lucide, il ne se cachait pas sa mauvaise foi, mais si cette violence tapie au fond de ses tripes masquait son dépit de vieillir, ses échecs et l'horreur de cette fin de vie où tout vous échappe, où le désir n'est plus qu'une succession de sursauts inassouvis, il n'ignorait pas que ceux qui avaient droit à la parole mentaient, payant de leur servitude le vedettariat. Les barbares – c'est ainsi qu'il désignait le reste de l'humanité – adulaient des stars qu'il exécrait. Il y avait bien quelques individus qui partageaient ses opinions mais ils se taisaient par crainte de passer pour ringards et surtout pour ne pas gâcher un éventuel retour de chance. C'étaient ceux-là qu'il avait fuis. Ses semblables qui le trahissaient. »

André a quitté Paris, ville qui l’a fasciné lorsqu’il y était monté à l’adolescence en compagnie de son père, ville où il a pu vivre sa vie d’homme aimant les hommes et assumer sa vie de rencontres et d’échanges culturels. C’est l’heure du bilan pour André. Lucien a été l’amour de sa vie. Il a oublié beaucoup de ses anciens amants mais Lucien, il ne l’oubliera pas. Celui-ci vit avec un autre homme mais ils sont toujours en contact et André attend son appel dominical qui le ressource. Confronté à la solitude, il organise sa nouvelle vie.

Parallèlement, nous suivons Malik, un prostitué sans-papiers avec qui André a partagé quelques moments et qui se trouve embarqué dans une mystérieuse organisation. Un lieu va jouer un rôle important, Le Château, comme dans Abel, précédent roman d’Hugo Marsan, ce lieu clos nommé Le Château est un univers d’enfermement et de découvertes essentielles.
André supporte mal l’hypocrisie des politiques et les dérives de la société qui exclue de plus en plus : « A ses yeux, le pourrissement de la vie politique était la cause de tous les maux. Notre pays n'a plus d'idéal. Quelle honte, disait-il, qu'on ne s'attaque pas à ces fantoches qui trahissent leur parti et rejoignent les rangs du pouvoir en place, dans la crainte de disparaître du devant de la scène. Et il concluait : Je hais l'humanité ! »

Des personnages importants et symboliques sont assassinés. Quelle organisation est derrière ?
L’intime de cet homme âgé alterne avec l’intime de Malik jeune homme à la dérive qui ne sait comment orienter sa vie. Les deux personnages se sont croisés et nous suivons leurs parcours.

Le roman est très bien conduit à la fois comme un roman policier et une réflexion sur la vie et la vieillesse, le temps qui passe, l’amour, les relations entre les êtres soit dans le mensonge soit dans l’authenticité. Hugo Marsan poursuit son chemin littéraire dans l’exploration des êtres et de leurs fonctionnements, dans l’approfondissement des réflexions philosophiques de l’être tout en maniant l’écriture romanesque avec beaucoup de sensibilité et d’efficacité.

Brigitte Aubonnet 
(05/03/09)   



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Mercure de France
(Janvier 2009)
162 pages - 15,80 €





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Hugo Marsan

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