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Jan SIMOEN


Un sale gosse




Nathan a seize ans, ce n'est plus vraiment un enfant, pas encore un adulte, D'ailleurs il aimerait autant ne pas ressembler aux adultes. En même temps, il rêve de leur liberté sans vouloir endosser leur responsabilité. Et, il s'agit bien de cela dans ce livre. Grandir, c'est aussi apprendre à assumer ses actes tels qu'ils sont sans se voiler la face et ça, Nathan n'en est pas encore capable alors il joue au caïd, se réfère au "parrain" et suce son mouchoir roulé en boule dans le commissariat en attendant l'arrivée de sa mère qui, croit-il, ne l'abandonnera jamais.

Le livre suit les pensées de cet adolescent, "mi-ange mi-vaurien", pétri de séries télévisées et d'idoles à imiter. Il croit savoir, comment se faire respecter et comment agir avec les filles selon un code d'honneur irrévocable, comment se déroule un interrogatoire dans un commissariat : C'est en fait une fenêtre bien sûr, avec une glace sans tain, tout le monde le sait ! Et derrière, n'importe quel connard de flic est peut être en train de m'observer et de m'écouter sans que je m'en rende compte ! [...] Ces flics me prennent pour un bouffon ou quoi ? Réveillez-vous ! Tous ceux de ma génération le savent, non ? Tout le monde regarde la télé, non ?
Il porte un regard critique et intransigeant sur les adultes qui l'entourent avec une arrogance presque insupportable, ponctuée de mauvaises blagues et de ricanements entre parenthèses qu'on entend presque : (Comme dirait Laurens, quand on fait le poireau chez les poulets on a le temps de monter en graine, ha, ha)
Le récit mime la voix de l'adolescent, son regard entièrement subjectif posé sur le monde, forcément biaisé alors qu'il le croit neutre.

Peu à peu, enfermé dans une cellule du commissariat, les apparences vont s'estomper et Nathan, seul, sera bien obligé de faire ce chemin jusqu'à la réalité. Le langage se transforme, plus incertain, plus intime au fur et à mesure que le héros accepte de laisser tomber l'image qu'il a forgée. Les références extérieures s'estompent et dévoilent l'angoisse véritable : Oh merde serait-il arrivé quelque chose à Ella ? Je me sens soudain glacé. Il est peut être arrivé quelque chose à Ella ? IL EST PEUT-ETRE ARRIVE QUELQUE CHOSE A ELLA.
En italique, le récit de ce qui a réellement eu lieu s'immisce peu à peu avant de s'imposer dans sa brutalité, comme contrepoint aux questions que Nathan se posent : Est-ce que c'est grave ce que j'ai fait ?

Aucune réponse ne lui sera donnée et ce sera à lui de faire le cheminement pour imaginer ce que Ella a pu ressentir, pour se mettre à la place de l'autre, assumer ses propres sentiments, comprendre que son prétendu courage n'est peut être qu'une forme déguisée de lâcheté et enfin, pouvoir se regarder dans la glace, sans faux-semblant et sans illusion.

Ce récit, qui a reçu le prix néerlandais du meilleur roman pour adolescent, maintient la tension jusqu'à la fin et emporte le lecteur dans cette attente jusqu'au dévoilement final qui ne peut manquer son but : faire réfléchir à la toute petite frontière qui sépare le sale gosse du délinquant...

Enora Bayec 
(08/10/09)    



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Jeunesse









Editions du Rouergue

doAdo Noir

160 pages - 8,50 €







Jan Simoen,
né à Ostende (Belgique) en 1953, est un auteur pour la jeunesse réputé. Il vit à Louvain. Un sale gosse a reçu l'an dernier le prix néerlandais du meilleur roman pour adolescents.