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Alain WAGNEUR


Hécatombe-les-Bains


Le commandant Zamanski, personnage récurrent dans l’œuvre d’Alain Wagneur, n’apparaît ici qu’en deuxième partie, au bout de 130 pages. Il faut dire que ce roman, paru cette année, se situe chronologiquement avant le précédent, Terminus plage, parce qu’il met en scène l’arrivée de Zamanski à Blainville-sur-Mer.

Pendant la première partie du roman, c’est son prédécesseur, le commandant Berger, qui assure d’une main de fer la sécurité de la paisible station balnéaire. C’est un personnage complexe, autoritaire, solitaire, à la fois justicier et pervers, qui n’hésite pas à exercer toutes sortes de pressions et à employer des méthodes plutôt musclées.

Un exemple avec cette bande de cambrioleurs (Paul Levant, William, Rachid et Hicham) confrontée à un inquiétant comité d’accueil en rentrant à leur dépôt.
— C'est qui ces mecs ? fit William clignant des yeux à toute vitesse.
Levant freina d'un coup sec.
Ils étaient trois, fringués en treillis, rangers aux pieds, batte de base-ball à la main, se tenant adossés à un gros 4x4, un Nissan. Levant s'arrêta, fit grincer la marche arrière mais la Pontiac bloquait le chemin.
Le gros sortit. Il était prêt à s'expliquer, prêt à négocier. Les trois mômes le suivaient.
— Qu'est-ce que vous voulez ?
Un coup au bide, violent, rapide et douloureux le fit se plier. Il vit Hicham sortir le cutter qu'il avait toujours dans la poche ventrale de son survêt. Un geste ridicule. Les types les avaient encerclés et ce fut le début.


La Pontiac dont il est question ici, une Firebird décapotable des années 1960, rouge et chromée, aussi discrète qu’une fête foraine sur la place d’un village, est bien entendu celle du commandant Berger et les hommes en treillis sont des nervis à son service.
Les délinquants traités de cette manière aussi illégale que sportive préfèrent ensuite exercer leurs talents sur des territoires moins dangereux.

Mais au moment où commence ce roman, le commandant est confronté à une affaire autrement ennuyeuse. Evelyne Pradier, propriétaire d’une agence immobilière et ex-épouse d’un conseiller municipal, s’est écrasée au volant de sa voiture dans un ravin. Accident ? Assassinat ? Berger mène l’enquête à sa façon, gardant pour lui seul les conclusions du médecin légiste et les indices qu’il recueille.

Si l’on ajoute à tout ça un goût artistique très personnel du commandant pour la photographie, dans une maison isolée, de jeunes femmes dans des mises en scène particulières, on comprend que les gens qui le détestent sont nombreux et qu’il est difficile de savoir d’où vient la balle de 9 mm qu’il prend dans la tête.

Heureusement, Zamanski arrive pour reprendre les choses en main et faire la lumière sur une situation policière assez glauque.

L’affaire Pradier est liée à un important projet de complexe touristique auquel les politiciens locaux attachent beaucoup de valeur. Certaines sociétés, parties prenantes du projet, se trouvent aussi liées à la maffia russe et à l’arrivée sur la côte normande des jeunes femmes dont usait et abusait Berger.

Avant de mourir, Evelyne Pradier avait pu remettre un dossier compromettant à un journaliste de la presse locale. Faute de pouvoir le publier dans son journal qui manque cruellement d’indépendance financière, le journaliste s’est adressé au chef de l’opposition qui traîne les pieds pour l’utiliser, préférant négocier une possible élection aux législatives. Tous pourris, les politiciens de Blainville !

Zamanski, avec l’aide de son adjointe, le lieutenant Laurence Frazier, démêle difficilement l’écheveau nauséabond tout en cautérisant au whisky les plaies morales qui lui ont valu son exil de la PJ de Paris vers ce poste en province.

Une fois encore, Alain Wagneur sait passionner son lecteur qui tourne avec avidité les pages pour aller de surprise en rebondissement dans une atmosphère bien sombre mais non dénuée d’humour et d’humanité.
Le commandant Zamanski, de livre en livre, impose sa présence et sa touche personnelle dans la famille des enquêteurs aussi désabusés qu’efficaces, les Nestor Burma, Pépé Carvalho et autres Adamsberg…
Un petit séjour à Blainville-sur-Mer hors saison, vous verrez, c’est très vivifiant, et beaucoup moins tranquille qu’on pourrait le croire…

Serge Cabrol 
(11/08/08)    



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Noir & polar









Editions Actes Sud
Babel Noir

420 pages - 10,50 €








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de l'auteur :
alain.wagneur.free.fr/










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Terminus plage