Ce texte, à la Julia Billet, avec son écriture étonnante et efficace, se situe à la frontière du fantastique. Pour les dix ans des éditions Rhubarbe, ce livre est le numéro 11 de la série qui s'achèvera en décembre 2014.

Une jeune femme qui travaille dans un restaurant et s'occupe de la fermeture de l'établissement voit un homme qui traîne alors qu'elle range. Il perd connaissance, elle va donc s'occuper de lui : « L'homme qui avait perdu conscience un infime instant s'est remis debout, s'est excusé. Je ne pouvais le laisser partir seul, même s'il ne semblait pas inquiet. Presque contre son gré, j'ai attrapé son bras, éteint les lumières puis baissé le store avant de sortir et de fermer la porte à clé. Dans la rue, l'air frais nous a surpris l'un et l'autre. L'homme jusqu'alors silencieux, s'est mis à parler. » Il a pris un médicament pour tout oublier, surtout la femme qui l'a quitté.

La jeune femme adore voyager et collectionner les objets qu'elle rapporte : « J'aime les prendre dans mes mains, les caresser, ne laissant pas un brin de poussière s'accrocher à ces trophées de ma jeunesse, du temps où je parcourais le monde dans l'espoir d'une vie pas comme les autres. J'habite dans le cimetière de ma mémoire avec ces objets qui donnent à ma demeure une allure de Maison du monde, ce magasin qui engrange les faux vieux objets d'ici et d'ailleurs, hauts en couleur. » Mais elle se dit que désormais son rêve est de fonder un foyer.

Elle va être la mémoire de cet homme qui va lui raconter sa vie tout au long de la nuit. Il disparaîtra, elle n'aura plus de nouvelles de lui, elle repartira en voyage, elle écrira un livre en mêlant l'histoire qu'il lui a racontée et son imagination. Un jour, elle recevra une lettre… dix ans plus tard…

On se laisse embarquer dans cette histoire où se frôlent imaginaire et fantastique. C'est une approche tout à fait originale du temps qui passe, d'une décennie qui a filé si vite…

Brigitte Aubonnet 
(03/05/14)