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L'incandescent Antonin A.
Un poète qui se mettrait dans la peau d'un autre poète cela paraîtrait
étrange, mais quand c'est un acteur qui se met dans la peau d'un poète
pour écrire un long poème d'amour pour ce poète que l'on
épouse momentanément, que l'on croit faire parler mais que le
poète, en fait, fait dire
Bon ! Soyons un peu plus clair
Charles Gonzalès est un acteur que vous avez certainement vu jouer : formé
au Conservatoire Supérieur d'Art Dramatique de Paris, dans les classes
de Pierre Debauche et d'Antoine Vitez ; il a joué notamment sous la direction
de Jean-Louis Barrault, Roger Planchon, Jorge Lavelli, Gérard Gélas,
Iannis Iordanidis, Hans Peter Cloos, Jacques Kraemer, Michel Fagadau, Jean-Louis
Martinelli
Et pour être plus complet sur ce chapitre : il met en
scène Caligula d'Albert Camus, La Mouette de Tchékhov,
La Maison de Bernada Alba de Federico Garcia Lorca, Purifiés
de Sarah Kane, Oh les beaux jours de Samuel Beckett, La voix humaine
de Jean Cocteau
Et pour l'avoir vu jouer à deux reprises, j'ai
eu l'occasion de lui dire tout le bien que je pense de son jeu plein de sensibilité
et faisant entendre les failles et les faiblesses très subtilement. Tout commence par une photo qui représente Gaston Ferdière et
Antonin Artaud, assis sur un banc dans le jardin de l'hôpital psychiatrique
de Rodez, la veille de la sortie du poète le vendredi 24 mai 1946 de
cet hôpital. Gaston Ferdière est le médecin psychiatre qui
administre les électrochocs à son patient Antonin Artaud, dont
une séquence d'électrochoc secoua tellement le corps d'Artaud
qu'il eut une vertèbre brisée ; Ferdière est aussi poète
proche des surréalistes. Dans l'avant récit, Charles Gonzalès
nous dit que la vision de cette photo lui a donné
une sensation comme si le temps arrêté était bien plus fort
que le sujet lui-même. Nous sommes dans un mouvement d'entrée dans la photo, car en oubliant le cadre photo, en ne voyant plus qu'un temps arrêté, Charles Gonzalès, entre en Antonin A. et dit ce qui se vit dans ce temps arrêté. Cela donne un long poème-récit d'une force et d'une intensité époustouflante, qui nous laisse pantois, comme si la densité du récit nous attrapait aux tripes et nous basculait dans un retour à nos introspections. Le récit s'organise par une prise de parole d'Antonin A. qui parle de sa situation et du photographe, de la photo. C'est logique de passer par là, pour ensuite ne plus s'occuper de l'objet et de ne s'intéresser qu'à la situation perçue pour finir par faire parler les personnages.
Moi, Antonin, Demain je me fais la malle. Je ne vous connais pas, Dans un deuxième temps : Il m'épouse, Moi, Antonin, j'en ai fini avec cette merde. Dans son troisième temps, comme une libération, le chant s'anime et prend sa liberté : Ce pou m'a parlé, il m'a parlé Pou, je m'adresse à toi !
Gilbert Desmée |
sommaire Poésie La feuille de thé (Juillet 2013) 128 pages - 20 €
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