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L’auteur évoque l’enfance de ses parents au fil d’une écriture poétique, imagée, parfois lyrique, souvent émouvante, nourrie par l’épopée familiale que sa mère lui contait le matin quand, à neuf ans, il la rejoignait dans son lit après le départ du père pour l’usine. Ce livre nous propose de suivre les sentiers de Nahima Ouali et Adan Hamroune, tous deux nés dans l’Algérie coloniale de 1930, elle vers Bejaïa, lui vers Sétif, deux enfants de Kabylie dont les chemins ne se croiseront vraiment qu’en France, bien plus tard, lorsque chacun, à son tour, aura pris le chemin de l’exil et traversé la Méditerranée. Première scène du roman : le 18 octobre 1935, Nahima assiste à la décapitation de son père en place publique. Double peine pour la fillette de cinq ans puisque sa mère, ce jour-là, après une dernière gifle, la confie à la grand-mère paternelle et ne la reverra jamais. Ce qui a conduit Ali Ouali sur l’échafaud, nous l’apprendrons plus tard quand l’aïeule le racontera à sa petite-fille. Adan est né dans une famille de forgerons mais s’est retrouvé orphelin très tôt. Les trois frères plus âgés que lui s’occupent de la forge. Adan, lui, est préposé à la garde de la vache qu’il emmène paître près d’une source, dans un champ assez élevé pour qu’il puisse voir la mer, au loin, à travers l’échancrure des montagnes. C’est là que Tannirt, sa sœur de trois ans plus jeune que lui, vient le chercher un jour de 1944 pour lui dire que les Français sont venus chercher Mohand, le frère aîné. Il a été dénoncé et des armes ont été trouvées dans l’étable. Malheureusement pour Tannirt, d’autres soldats viendront et ne se contenteront pas de la gifler... Nahima aussi sera confrontée aux exactions de soldats français mettant le feu près du village pour ensuite interpeller un supposé pyromane, lui confisquer les terres et les attribuer à de nouveaux colons. Après la mort de Mohand sous la torture, Adan est devenu forgeron lui aussi, un véritable artiste, ce qui lui permettra de rencontrer celui qui l’aidera à quitter le pays en mai 45, le jour du massacre de Sétif... Le roman alterne ainsi les événements qui jalonnent la vie des deux adolescents avec, ici et là, les contes de la grand-mère qui enchantent Nahima. On peut remercier Zadig Hamroune d’assurer à son tour cette transmission, dans une autre langue que le kabyle d’origine mais avec le même art du conte et de la poésie, alternant le plaisir et les malheurs, les épreuves et les victoires, déployant une vaste palette d’émotions et de sentiments, pour construire un roman qui emporte et captive le lecteur de chapitre en chapitre comme une Shéhérazade des temps modernes. Serge Cabrol |
Sommaire Lectures La Table Ronde (Août 2015) 256 pages - 17 €
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