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Joël SCHMIDT

Les amants



Johann, cinquante ans, enseigne en classe de khâgne. Aurore de Prévaudal, dix-huit ans, est son étudiante. Ils vont signer un pacte : s'aimer en suivant les codes du fin'amor, c'est-à-dire l'amour courtois médiéval. Ils choisissent le versant allemand de cette forme d'amour, qu'ils vont abriter en grande partie à Nuremberg où, depuis la chute du Mur, certaines cours d'amour, comme des confréries secrètes, ont fait leur réapparition. Tannhäuser et Wolfram von Eschenbach font d'ailleurs partie de l'aventure, car soudain le temps bascule et les héros se retrouvent, ou croient et veulent croire se retrouver, au plein cœur du Moyen-âge, cette époque qu'ils vénèrent – Johann est un médiéviste enthousiaste, auteur d'un essai sur La Minne (l'amour courtois, en allemand) ; Aurore ne lit que ce qui se rapporte au Moyen-âge, se réfugiant dans cette époque lointaine et, lui semble-t-il, rassurante et cadrée, peut-être pour échapper au traumatisme d'une enfance encombrée d'un père trop pressant.

Les amants vont suivre les trente-et-un préceptes, ou codes, de La Minne comme autant d'étapes vers un dénouement qui ne peut être que tragique. Car ils sont amants, Johann et Aurore, bien que mariés. Mais mariés civilement. Là est toute la différence, pour eux. L'amour courtois ne vaut que pour les amants, pas pour les époux. Ces trente-et-un préceptes sont un parcours de perversité et de frustration, de manipulation et de sadomasochisme, qui ne suit pas forcément une courbe ascendante. Parfois, il y a des pauses dans le combat, et l'on peut respirer. Mais parfois, aussi, la mort guette : l'amante est plongée dans le coma lors d'un accident sur la voie publique, ou bien encore l'amant est embroché à l'épée par son rival, lors d'une cérémonie secrète tournant à la débauche plurielle.

Joël Schmidt met en scène dans Les Amants les prolongements romantiques des codes médiévaux. D'ailleurs, le narrateur appartient à une branche lointaine de Kleist. Le roman, sous couvert de relations contemporaines et provinciales, est en fait un traité d'amour courtois revisité. Qui finit dans le sang mais pas dans la peine. Qui en appelle à la nostalgie culturelle et poétique.

Christine Bini 
(20/03/14)    
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Albin Michel

(Janvier 2014)
200 pages - 16 €





Joël Schmidt

Bio-bibliographie
sur le site de l'auteur
www.joel-schmidt.com