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Maurice GOUIRAN


Le printemps des corbeaux



Nous sommes à Marseille en mai 1981, pendant l’élection présidentielle. François Mitterrand est élu président de la république. Le bourgeois a peur des socialo-communistes, peur d’être dépouillé,  la pègre continue ses petites affaires et comme toujours à Marseille se met au service des politiques.

Luc Rio dit Louka passe sa licence d’informatique à Luminy, il veut devenir programmeur en ce temps des débuts de l’informatique. Il a eu une enfance difficile après la mort de son père et l’abandon de sa mère, enfance qui s’est passée dans les foyers de la DASS ou dans des familles d’accueil. Mes jeunes années me laissait plutôt la sensation d’une humiliation et le souvenir d’un interminable et déprimant ennui. Pour toute famille il ne lui reste que sa grand-mère, Mameté, découverte sur le tard et qui passe la journée à fumer et à écouter de vieilles chansons et Ouncle, un truand de la vieille école, ami de son père et à ses côtés quand il a été abattu par la police.

C’est peut-être dans cette enfance que Louka a forgé un profond cynisme, où plutôt une double personnalité. En surface, c’est un étudiant sérieux, plus, méritant, puisqu’il fait des petits boulots pour financer ses études. En surface, il est un étudiant seulement préoccupé par ses examens.

Alors que c’est un être profondément immoral qui n’hésite pas à monter des escroqueries. Je ne savais jamais, par avance, ce que j’allais récupérer. Ma combine s’apparentait un peu à la pêche au carrelet, telle qu’elle se pratiquait dans les estuaires de la Charente, de la Gironde et parfois même en Camargue. On ne pouvait jamais prévoir exactement ce que l’on allait remonter dans le filet, mais on savait qu’on ne rentrerait pas bredouille.

Mai 81, c’est aussi le moment où le Canard Enchainé lance l’affaire Papon faisant ressortir un sinistre passé. Papon, Barbie, Touvier./ L’infernale Trinité./ Le fonctionnaire, le militaire, le milicien./ Un brelan d’as pour l’ignominie. Passé qui donne des idées à Jeannot, employé aux archives départementales, Jeannot qui ne se remet pas de sa guerre d’Algérie et à Louka. Et c’est le Marseille fangeux de la délation qui ressurgit car comme l’écrit en 1947 André Negis dans Marseille sous l’occupation : « Marseille a été pour les soldats de l’ombre la ville la plus dangereuse. Pourquoi ? Parce que la Gestapo voyait s’allonger à ses guichets la liste des délateurs. »

Louka constate ce boueux passé : J’avais lu des dizaines de lettres dans lesquelles les mères dénonçaient leur fils, les fils dénonçaient leur père, les sœurs  dénonçaient leurs frères. Tout est possible lorsqu’on permet à l’homme de redevenir l’animal qu’il n’a jamais cessé d’être, lorsqu’on excite ses plus bas instincts, sa haine, sa jalousie.

Ce roman plein de rebondissements est une histoire des années 80 dans l’Histoire glauque de Marseille des années 40. De lettre de délation en lettre de délation on contemple la bassesse de nombreux humains quand un système les encourage à être vils. À lire pendant une campagne électorale pour en trouver tout le sel.

Michel Lansade 
(09/03/17)    



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Noir & polar








Editions Jigal
248 pages - 18,50 €




Maurice Gouiran,

auteur d'une bonne trentaine de romans, voit désormais ses livres sélectionnés dans la plupart des prix du Polar.

Bio-bibliographie
de Maurice Gouiran
sur wikipédia


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