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Retour de bagne d'un communard déporté Il y a presque cinquante ans paraissait chez Maspero un livre de Paul Lidsky intitulé Les écrivains contre la Commune. Dans ce livre, l'auteur nous livrait une étude approfondie – textes à l'appui – de l'attitude des principaux écrivains de cette époque face aux événements et aux acteurs de la Commune de Paris. À part quelques écrivains (Vallès, Rimbaud, Verlaine, Hugo) la grande majorité d'entre eux, de Flaubert aux Goncourt, de Maxime du Camp à Feydeau, de Zola à George Sand, d'Anatole France à Théophile Gautier et bien d'autres, ont condamné la Commune avec une violence stupéfiante. La figure du communard et de la communarde y est décrite exclusivement en termes injurieux : 'barbare', 'paresseux', 'alcoolique' 'hystérique', 'orgiaque'. Bref, toute humanité, tout sentiment, toute dignité est déniée au peuple qui par essence est incapable d'accéder à 'l'intelligence'. Et quand bien même certains ouvriers seraient 'instruits', c'est l'instruction qui les a pervertis ! L'objet n'est pas ici de rapporter les innombrables propos aussi ignominieux que grotesques de ces écrivains cités par Paul Lidsky, mais de rappeler que cette violence et cette hostilité ont accompagné – et soutenu – la sanglante répression des Versaillais contre les communards et qu'elle a conduit au bagne en Nouvelle Calédonie des milliers d'entre eux. C'est le journal de bord de l'un d'entre eux, sur le chemin du retour du bagne après l'amnistie, que reconstitue Gérard Hamon. Ce communard que l'auteur nomme *** est un inconnu, cependant il est inspiré d'un communard bien réel, Amédée Guélet, qui fut fait prisonnier en 1871 et condamné à la déportation. Il est l'un des 410 communards ramenés en France à bord du navire Le Var à la fin de l'été 1879. Bien qu'imaginaire, le journal de bord de *** s'appuie sur une importante documentation historique et un travail d'archives effectué par l'auteur, ce qui donne du corps et de la crédibilité à cette fiction et bat en brèche – s'il en était besoin – tous les préjugés de nos écrivains cités plus haut. Car en effet, le journal de bord de *** n'est pas celui d'une grande figure de la Commune, mais celui d'un simple combattant. Une belle réussite de ce livre c'est aussi la manière dont l'auteur introduit subtilement dans la chronologie du journal de *** une foisonnante documentation puisée auprès de 'vrais' communards (Augustin Nicolle, Marc Gonthier, etc.) mais aussi puisée dans la prose populaire. Remarquable aussi, c'est cet 'esprit de la Commune' restitué simplement sous la plume
de *** : La Traversée, une belle fiction, une fiction qui exhume de l'Histoire des voix que l'on aimerait entendre plus souvent. Yves Dutier |
Sommaire Lectures Pontcerq (Octobre 2016) 296 pages - 12 € |
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