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Non, à part la nouvelle Technique mixte ce recueil ne vous en apprendra pas plus sur l’art du dessin du même nom célèbre depuis le XVIe siècle pour sa douceur ocre et le rendu de ses courbes. Et pour la nouvelle citée, la seule qui s’inscrit dans le domaine de l’art et la peinture, les sanguines évoquées s’avèrent sans oxyde de fer et réservent quelques surprises aux experts. Si Pascale Pujol n’aborde pas directement ces interdits religieux liés au sang menstruel des femmes et préfère flirter avec le surnaturel, évoquer les survivances chamaniques et la magie (Magie rouge, Sortilèges, L’alignement des planètes) pour dire la peur et la fascination des hommes face à ces saignements réguliers liés au phénomène puissant de la maternité, elle ne s’arrête pas à ce seul aspect. C’est avec une grande diversité d’approche qu’elle balaye tout le territoire de son sujet, de façon souvent décalée, des survivances ancestrales au contemporain (Vernis à ongles, Dernier round, Le samovar), de la transmission familiale (Le passage, La boîte à secrets) à l’univers marchand (Lady-Net, Monsieur Ragnagnas, La coupe est pleine) avec une malice et un goût de la provocation salutaires et immédiatement perceptibles. Si je me livre au jeu éminemment subjectif du tiercé des préférences, la nouvelle La coupe est pleine qui saisit sur le vif une réunion d’actionnaires et de cadres d’une société spécialisée dans les protections féminines face à l’apparition d’un nouveau produit qui pourrait mettre à mal le chiffre d’affaires, ce régal de machisme, de discours capitaliste et de second degré, a provoqué en moi un mélange rare d’envie de cogner et de rire à gorge déployée et m’a paru particulièrement percutante. Technique mixte, ce bijou au carrefour de l’art et du féminisme sur fond de provocation, de moquerie sur le marché de l’art et la prétention des experts qui en tiennent les rênes, du pouvoir et des investissements financiers à l’œuvre dans ce secteur, m’a paru particulièrement jouissive et bluffante. Enfin, en troisième position, Lady-Net, plus classique dans sa facture par son aspect réaliste et sa noirceur l’apparentant à l’univers du polar, pour son adresse à signifier le dégoût et sa dextérité à jouer sur plusieurs niveaux de lecture, me semble confirmer tout le talent de cette auteure dont c’est le quatrième livre. Il fallait beaucoup d’audace et un sacré talent pour façonner un recueil de nouvelles aussi impertinent que sensible, inquiétant, satirique, étrange ou malicieux, sur un thème aussi glissant sans en gommer à l’occasion l’érotisme mais sans jamais tomber dans le militantisme ou le scabreux. C’est un pari réussi. Une fois dépassé le premier mouvement de pudeur et de malaise lié au sujet, ce recueil original mérite qu’ hommes et femmes s’y plongent et le dégustent, pour ses qualités littéraires mais aussi pour sa liberté de ton, sa féminité affirmée et son esprit élégamment frondeur. Dominique Baillon-Lalande |
Sommaire Lectures Quadrature 256 pages - 19 €
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