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Ludovic-Hermann WANDA

Prisons



Le personnage de ce roman, Frédéric Nkamwa connu sous le nom de Blondin, connaît bien l’univers carcéral puisque l’auteur y a lui-même séjourné. Frédéric se fait arrêter Gare du Nord revenant de Bruxelles avec un kilo de drogue qu’il vient d’acheter en Hollande.

Il est incarcéré à Fleury-Mérogis où il partage sa cellule avec « un certain Richard. Un jeune de vingt-sept ans qui ressemble comme deux gouttes d’eau à une seringue usagée. »

Marianne de la République intervient à la première personne au fil du roman. Dieu est très présent et le Diable, lui, dont les conseils apparaissent en italique, insuffle des idées de violence et de vengeance.

La prison est toujours un moment très particulier qui peut détruire certains ou donner une chance à quelques-uns. Comment va évoluer Frédéric et quel rôle va-t-il jouer auprès de Richard ? C’est tout l’enjeu de ce roman.

« Il est ici question des cris de la solitude subie, échappés de gorges abandonnées par le plaisir de vivre et dont certains résonnent comme un clap de fin prématuré ; puisqu’il ne se passe pas une semaine sans que la faucheuse ne réponde à l’appel d’un détenu décidé à en finir avec sa non-vie, avant que ce ne soit elle qui décide d’en finir avec lui. »

La structure du texte est constituée d’allers et retours dans le temps avec la même scène vue par des regards différents, ce qui donne parfois une sensation de redites sans trop altérer néanmoins le rythme de ce premier roman.

Des discussions sur les idées reçues et les a priori se retrouvent tout au long du livre.

La langue du narrateur évolue au fil du temps puisqu’au fur et à mesure de ses études et de son désir de s’en sortir, il abandonne peu à peu le parler banlieue pour utiliser un langage plus élaboré. Un mini glossaire en fin d’ouvrage éclaire notre lecture.  Lecture qui est d’ailleurs omniprésente et essentielle pour Frédéric : « J’ai enfin compris, j’ai enfin percé le mystère de l’avancée de l’homme : c’est la lecture ! » « En parlant de noir, grâce à la lecture, désormais, je sais que je ne suis pas un Noir, ni un Black, ni un Négro. J’ai compris que ce ne sont là que des mots qui décrivent une apparence. »

Frédéric formule le souhait que la société aide plus les jeunes en perdition : « J’ai espoir qu’un jour nous serons transportés des tribunaux à l’hôpital social, là où nous devrions nous trouver, au service des grands brûlés, afin d’y être réanimés, soignés avec les pansements de la nouvelle chance. »

Frédéric est déterminé, il se bat pour ne pas revenir de nouveau en prison. Il est un peu utopiste mais il est encourageant et positif vis-à-vis des autres détenus. Il est exigeant avec lui-même comme avec les autres.

La confrontation entre les Noirs, les Juifs et les Arabes existe mais Frédéric tente de situer le débat au niveau de l’humain, de l’entraide, de la non-violence puisque : « Beaucoup de mecs sont en prison à cause de cette logique de la violence extrême. »

Ludovic-Hermann Wanda sait de quoi il parle. Son roman est chargé d’authenticité ce qui le rend émouvant. Il nous permet de plonger dans un univers méconnu et donne à son roman l’espoir qu’il est possible de sortir de l’engrenage des emprisonnements successifs, trouver sa voie et donner une direction positive à sa vie.

Brigitte Aubonnet 
(15/10/18)    



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L'Antilope

(Août 2018)
288 pages - 19 €











Ludovic-Hermann Wanda est né en 1981 à Paris dans une famille camerounaise. À 20 ans, il est incarcéré à Fleury-Mérogis pour trafic de drogue. Il y entame des études. Il est à présent diplômé en mathématiques et philosophie. Prisons est son premier roman.