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Silvaine ARABO

Au fil du labyrinthe
suivi de Marines résiliences


Au fil du Labyrinthe, dédié à la mère de l’auteure, fut écrit à vingt-six ans, trois mois après la disparition précoce de cette figure maternelle fondatrice. Le texte oublié dans un tiroir a été retrouvé, revu et corrigé par la poétesse pour être, plus de trente recueils édités et cinquante ans plus tard, enfin publié. Comme l’exprime la quatrième de couverture, « le lecteur y verra l’enfant d’autrefois » brisée par le chagrin de cette mort précoce, incapable de se résoudre à cet adieu et confrontée à un vide vertigineux avant de se mettre progressivement en quête de l’acceptation de ce deuil, avant que l’espoir, l’amour de l’écriture et la vie ne frappent de plus en plus souvent au carreau. La mort d’une mère est une expérience traumatisante, une rupture existentielle, qui vous perd dans un dédale du chagrin face à cette perte irrémédiable. Ne reste qu’à entrer dans le labyrinthe de la douleur et de l’absence pour parvenir à exorciser par les mots l’insupportable. Alors comme Thésée venu en Crête tuer ce Minotaure dans son labyrinthe, dévorant chaque année sept garçons et sept filles qu’Athènes lui livrait pour conserver la paix avec Minos, qui sortit victorieux de l’épreuve grâce au fil tendu par Ariane, fille de Minos, qu’il lui suffit de suivre après avoir tué le monstre pour ressortir du piège, Silvaine Arabo, suivant le fil du cœur et des mots retrouve sa route vers la lumière. Alors seulement il lui sera possible de porter son regard devant elle pour simplement recommencer à vivre. 

« Perdus dans le labyrinthe des mots
quel fil d’Ariane nous surprendra
ténu
quel espace non tracé
à la frontière de nos mémoires. »

« Angoisse du dire
Tendresse où gît l’absence
Un à un
Se fabriquaient les mots
s’étonnent d’exister, une
imprécision de soleil
tremble au fond de nos voix.
J’imagine le seul élan du rythme
soupesé par l’amour. »

« Il fallut bien vivre.
Et proclamer que rien
n’était plus beau
que le rire. »

 

La deuxième partie, Marines résiliences, illustre cette remontée à la surface. Dans la quatrième de couverture, Silvaine Arabo rappelle que « Les grandes blessures ne se referment jamais vraiment. On les porte et elles nous portent. L’essentiel est d’en faire l’alchimie, d’une manière ou d’une autre, et c’est précisément cette alchimie qui rend la douleur supportable et parfois même la guérit. On appelle aujourd’hui cela ‘résilience’. » Dans ce texte écrit deux ans plus tard, la contemplation des paysages maritimes liée au sentiment amoureux éclaircit le ciel demeuré trop bas, trop longtemps et permet au souffle de la reconstruction de s’infiltrer.

« À la mesure du sang, je te réinvente.
Nous devinons à travers nous
l’unique et tendre cœur
qui fragile et bat : pouls universel
au seul espace qui nous séparait encore
voici quelques secondes. »

Les derniers vers ferment la boucle :
« On se rassure. On va au bord de l’habitude. Tout redevient
normal O les seules gerbes du désespoir
côté jardin le vent est plein de mythes
Adieu »

La poésie de  Silvaine Arabo est plus évocatrice et intuitive que savante ou déclamatoire. Jamais elle ne se départ de son émotion et de son mystère, jouant sur une rythmique brisée, une liberté stylistique et  une évidente intériorité. Silence et chant (mots surgissant de façon récurrente dans ces deux textes)  s’entrelacent ici comme l’ombre et la lumière sur la mer pour exprimer des émotions, « des  états que chacun peut reconnaître comme les siens, les ayant déjà perçus, ici ou là, de manière fugace et fragile. »
Une émouvante immersion dans le deuil et l’amour et la vie.

Poétesse, directrice littéraire, artiste peintre et créatrice de la revue Saraswati, Silvaine Arabo fut une des premières à se lancer  en  1997 dans l’aventure d’Internet pour le mettre au service de la Poésie.

Dominique Baillon-Lalande 
(28/06/19)    



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Poésie











Rafael de Surtis

(Février 2019)
100 pages - 15 €