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Étrange et déroutant, ce livre est l’œuvre d’un narrateur qui n’a pas le droit d’écrire. Hubert Lambert est lecteur de manuscrits et photographe dans une petite maison d’édition parisienne dirigée par deux « patronnes » très autoritaires. Il occupe « un tout petit bureau, aménagé au 5e et dernier étage (sans compter l'étage des chambres de bonnes) dans un appartement aussi cossu que l'immeuble. […] Un réduit qu'une seule fenêtre éclaire et dont l'air raréfié semble avoir été corrompu par des générations de lecteurs, tout entier absorbés à raturer, biffer, corriger, critiquer, enterrer. » Petit clin d’œil au fantastique ou à l’Oulipo, on trouve un exemple de littérature par anticipation. En effet, Hubert Lambert a l’impression de retrouver sa vie dans un feuilleton écrit près d’un siècle plus tôt pas ses deux amis. « C'est comme s'ils m'avaient connu avant que je n'existe, comme s'ils m'avaient prévu, anticipé. Roger (car c'est Roger qui a écrit le feuilleton – A1-42, Parque Moderne) est mon auteur, mon père, mon ami, et je prolonge son œuvre en vivant. » Comme Hubert se plaint de ne pas recevoir suffisamment de manuscrits pour en découvrir certains publiables, les éditrices lui proposent de travailler à mi-temps à la poste. « Dès que tu verras des enveloppes qui seraient susceptibles de contenir des manuscrits, tu les subtiliseras et tu les porteras dans ton repaire où tu pourras enfin te livrer à ton travail. » Et ainsi, de chapitre en chapitre, ou plutôt d’épisode en épisode puisqu’il s’agit d’un feuilleton, nous assistons à la construction de ce roman qui n’en est pas un par un auteur qui n’écrit pas. Les aventures et les rebondissements ne manquent pas car Hubert Lambert n’est jamais à court d’idées pour sortir de son cagibi. Bref, il s’occupe et il écrit, mais en cachette, sans en avoir l’air, et le résultat est assez réjouissant. Une curiosité qui mérite le détour. Serge Cabrol (08/07/19) |
Sommaire Lectures Le Lampadaire 144 pages - 11 € |
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