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MUTT-LON

Les 700 aveugles de Bafia

C’est un très intéressant témoignage sur une mission médicale en Afrique, qui a eu lieu en 1929, dans le but de soigner la trypanosomiase, la maladie du sommeil. Plusieurs médecins sont partis au Cameroun. Tous avaient comme objectif celui d’être utiles.

Le traitement était efficace mais l’un des médecins a augmenté les doses administrées dans les cas les plus résistants, sans tenir compte du protocole établi. Il a commencé avec un malade qui était un chef de clan et comme les résultats étaient spectaculaires, il a poursuivi avec d’autres malades. Mais peu à peu, un problème majeur est apparu, de plus en plus de patients devenaient aveugles. Le lien avec le traitement a été vite établi par les habitants des différents villages.

« Comme aucun indigène n'était au courant qu'il est déconseillé de trop manier un malade du tétanos, Bertignac était indéfendable. Le cadet le tint ensuite pour complice de la mort de son père, le vieux chef, car la cécité dont l'ancien avait été affligé n'était pas naturelle, mais c'était assurément une machination organisée par les colons blancs contre les Africains. Il n'eut pas à en dire plus. »

Damienne, jeune médecin, en conflit avec sa famille a fait partie de cette mission. Elle a été envoyée dans la région des villages qui ont été le plus touchés par ce scandale sanitaire par le docteur Jamot au début du siècle dernier.

Longtemps après, elle retourne au Cameroun sur les traces de cette aventure où elle a vécu des émotions très intenses qui ont marqué sa vie. Elle recherche un médecin qui l’a sauvée en 1929. « Elle avait rêvé de ce pèlerinage pendant des décennies. Mais, alors qu'il commençait à peine, Damienne se sentait déjà lasse. La consécration et la satiété avaient émoussé cette fureur de plaire qui la rendait presque invivable dans ses jeunes années. Elle avait perdu la foi quasi-mystique qui lui avait permis de survivre à mille naufrages. C'est peut-être pour cette raison que Damienne avait accepté de revenir au Cameroun, après réception de la lettre de Sikini, pour marcher sur ses propres pas et revivre ne serait-ce qu'en pensée cette belle et chaotique époque de sa vie, où elle n'avait rien à miser mais tant à perdre. »

C’est un témoignage très fort et très bien documenté. Il se lit comme un roman d’aventures avec de multiples rebondissements qui maintiennent le suspense jusqu’à la fin. Cela pose le problème des missions humanitaires avec toutes leurs contradictions, leurs effets positifs et malheureusement parfois négatifs.

Brigitte Aubonnet 
(04/03/20)    



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Lectures








Emmanuelle Collas

(Janvier 2020)
264 pages - 16 €







Mutt-Lon,
né au Cameroun en 1973, travaille comme monteur.
Il a obtenu le prix Ahmadou-Kourouma pour son premier roman, Ceux qui sortent dans la nuit.