Le quotidien répétitif et le manque de visibilité sur le meilleur des mondes secrètent suivant les individus une recherche hédoniste ou une désespérance contrôlée, voire plus si manque total d’affinités avec la vie. Et certains surdoués se servent de cette palette ultra-sensible pour nous émouvoir profondément ou nous déclencher un rire de connivence.

Jean-Michel Ribes, qui les détecte avec un flair époustouflant, met le Théâtre du Rond-Point à leur disposition depuis cinq ans. C’est ainsi que dans son univers ribien qui éclaire efficacement le monde de notre époque, Pierre Desproges précède Roland Topor ou Jean Yanne et qu’arrive François Morel avec Le soir, des lions...

D’autres talentueux contemporains méritent également l’admiration du plumitif signant cette rubrique mais Morel… c’est ici et maintenant.

Vous n’avez qu’un mois pour aller participer à son univers débridé qui pose les questions essentielles et y répond en musique sans oublier de mettre les pieds dans une bassine. Vous sentez déjà combien ce dernier point est important car en même temps sa tête reste dans les nuages et son cœur bat dans la lucidité vulnérable !

On savait depuis Collection Particulière que ce comédien à nombreuses facettes avait du goût pour les chansons et sa capacité à faire des siennes un véritable spectacle. Avec Le soir, des lions... il confirme et signe.

Et dans un fond de sauce soigneusement mitonné avec Juliette qui l’a mis en scène, vous trouverez dans ce qu’il appelle son bric-à-brac des tas d’émotions touchantes et de rires imprévus – voire des renseignements précieux sur l’art de vivre en famille surtout si vos grands-parents vivent un relationnel au couteau – ainsi que des nouvelles du regretté Teddy Vrignault.

Vous saurez aussi comment répondre aux enfants quand ils demandent à leurs parents « A quoi ca sert la vie ? » et rappeler à tous ceux qui oublient les tentations totalitaires qu’elles rôdent toujours de par le monde.

Les musiques d’Antoine Sahler et de Reinhardt Wagner mettent fort heureusement les textes en valeur et elles permettent aux trois musiciens complices de participer au spectacle avec grand brio et avec leurs cuivres coruscants et autres xylophones. Zeugmatiquement parlant.

Le soir, des lions... décoiffe avec bonheur dans un décor d’une totale liberté de cette aimable tendance libertaire qui n’oublie pas d’être ludique. Et ça touche directement le cœur de la cible à la façon d’un trait de Chaval.

Claude Chanaud 
(03/06/10)