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Christian GIUDICELLI


Tour de piste


Avant de réjouir les spectateurs d'un théâtre heureusement novateur, la Générale de Tour de piste aura lieu le 6 juillet au Festival d'Avignon.

Cette récente production de la scène contemporaine, qui vient d'être présentée en avant-première au théâtre des Déchargeurs, nous raconte tout simplement mais fort brillamment une vie d'homme de notre temps et le comédien qui est sur scène… c'est peut être vous. Non… c'est sûrement vous !

Chris, qui est seul en compagnie d'une chaise, va nous raconter son parcours de vie. De sa naissance à sa fin, y compris les multiples trahisons de la tradition humaine. Ce qui est apparemment classique et malheureusement coutumier de notre époque apparaît, ici en maintenant, aussi lucide de nos faiblesses et de nos successives cicatrices que porteur d'émotions. On y croit.

Le procédé n'est pas nouveau mais, à ma connaissance, il n'a jamais été aussi efficace que dans cette éblouissante prestation de Stéphane Hillel où convergent les talents d'un texte ciselé par Christian Giudicelli et une mise en scène aussi vive que légère de Jacques Nerson. Reste que les décors subtilement accompagnateurs de Claire Belloc y ont aussi leur part. Ainsi que le jeu des éclairages.

Vous avez compris qu'il s'agit là du récit d'une vie d'homme qui, peu ou prou, est la vôtre et qui va, en une heure quinze, vous faire passer du cri du nouveau né à celui du dernier acte. En vibrant. Cette sorte de cri primal nous y accompagne donc en permanence à la façon du péché original des chrétiens ou plutôt d'un destin aussi taquin que primesautier. Et le parcours se renouvelle suivant les modes des époques. Ainsi le grassouillet bourgeois gentilhomme cède le pas de la promotion sociale au bobo qui ne s'en remet toujours pas d'aller en thalasso à Dinard après avoir prôné la révolution de Mai 68.

Les incontournables iconoclastes de Charlie Hebdo ont dit un jour : "Nous nous sommes battus pour ne pas être ce que nous sommes devenus."

L'homme dont Giudicelli a organisé le périple et qui se révèle, à son tour mi victime mi complice, ne prétend pas autre chose quand il ponctue ses prises de conscience d'un destin très souvent contrarié en disant : "Chaque fois qu'on a mal, on crie, quand on est heureux aussi."

Tour de piste souligne ainsi un vrai besoin de modestie et de sympathie car l'anar de vingt ans aux coruscantes prétentions révolutionnaires et novatrices annonce rarement un brillant parcours. Tandis que l'instituteur ayant réussi au cours des ans à faire comprendre et réciter Le corbeau et le renard à des enfants récalcitrants mérite souvent un éminent hommage. C'est justement ce que Chris constate en fin de parcours ! Juste avant de serrer une main au pouvoir limité de l'affection humaine. Fut-elle familiale.

Alors : Ratage d'un grand destin ou humble réussite ?

C'est simplement la vie d'un homme des années 2000. Observée de Sirius, la différence n'et pas grande mais vue d'un fauteuil d'orchestre on peut au moins conclure "Voilà du théâtre". À classer sans états d'âme dans les bonheurs de scène de l'an 2012.

Claude Chanaud 
(28/05/12)    



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Montreurs d'ours








Théâtre
des Corps Saints


76 place des Corps Saints
84 000 AVIGNON


À partir du 7 juillet





Une pièce de
Christian Giudicelli

Mise en scène
Jacques Nerson

Avec
Stéphane Hillel

Décors
Claire Belloc