« Le dromadaire poursuit sa ronde sous les fenêtres du palais du bey. Ce sont les vacances à la mer et la fraîcheur du patio où dégringole le jasmin, une brève incursion dans un autre monde, grâce à ce cousin qui l'a invité un été, il y a de cela deux ans. Sur la terrasse, les corps bruns des voisines au soleil... Elles ont la couleur du miel et leurs voix semblent feindre d'ignorer qu'il les épie avec son cousin. Leurs paroles montent jusqu'à eux et leurs yeux se tournent vers le muret où se cachent les deux adolescents. Abandonnées au soleil et aux délices de l'après-midi, elles babillent, s'amusent de tout et de rien. Il contemple leurs dents blanches, leurs lèvres entrouvertes, fasciné par leur bonheur de vivre. »

Extrait de la nouvelle Nuit de fête

L'excellente revue littéraire Encres vagabondes vient de créer sa collection et de publier son premier titre, un très beau recueil de douze nouvelles de Cécile Oumhani. Une écriture limpide, la grâce d'un décor ciselé de lumière, métamorphosent la désespérance du thème. Cécile Oumhani raconte avec une lucidité noyée de tendresse le destin blessé de jeunes femmes et de jeunes hommes pris au piège des traditions misogynes d'un islam obsédé par la suprématie masculine et voué à l'image de la mère. La mémoire écorchée de Cécile Oumhani oscille entre mélancolie et plaidoyer.

Le Monde (vendredi 9 février 1996)