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Roger BÉTEILLE

La rivière en colère



Roger Béteille nous a habitués à de beaux récits du terroir, créant des personnages indissociables de la terre qui les entoure. (voir ci-contre les livres chroniqués sur notre site)

Dans son dernier roman La rivière en colère, il nous dépeint une terre et ses habitants bouleversés par un événement extraordinaire. Nous sommes dans les années 30. Des financiers et des politiciens ont décidé de construire un barrage dans cette vallée reculée du Massif Central.

Mais que connaissent ces hommes de ce village, eux qui signent leur accord dans un salon du Ritz à Paris ? Que savent-ils de l’attachement des gens à leur terre qui n’est, pour eux, qu’un point sur une carte ? Comment peuvent-ils comprendre que l’argent ne suffit pas toujours à régler les émotions, à modifier une vie ancrée dans les traditions ?

La construction du barrage est décidée malgré tout. Et nous, lecteur, nous la suivons pas à pas à travers les yeux des habitants de la vallée et ceux aussi de ses ingénieurs. C’est ainsi que se dressent quelques figures pittoresques, que naissent des portraits subtils car, comme dans la vie, les personnages ne sont pas faits que d’un seul bloc.

Charles Neuville, le fringant et ambitieux jeune homme à qui on a confié la direction du chantier devient un des principaux acteurs de ce roman et on s’attache à lui comme on s’attache à tout être humain qui évolue, réfléchit, apprend dans l’action. Car la tâche de Charles Neuville n’est pas facile : il doit faire face à la résistance des « ploucs » – comme dit son patron – et notamment à la fronde de Hilarian Boudet, un vieil homme solitaire que rien ni personne n’intimide. Il doit également affronter « la rivière en colère » qui se déchaîne après un mauvais temps exceptionnel et qui semble avoir raison du chantier et de ses ouvriers. Et Charles dont la vie de couple bat de l’aile, est parfois aussi seul qu’Hilarian quand celui-ci comprend que son fils sur qui il mettait tous ses espoirs restera à Paris. Mais Hilarian, loin de l’apparence fragile que lui donnent le malheur et la déception, prendra dans sa folle lutte une stature de héros.

C’est donc dans un climat de grande tension que se déroule cette histoire où les habitants eux-mêmes s’opposent, se déchirent, où une vie traditionnelle se modifie avec l’arrivée massive d’ouvriers étrangers (le Tchèque Warzek campe un autre beau personnage bien structuré), où des destins se nouent et se dénouent.

Ce roman est aussi un témoignage de la lutte de l’homme contre la nature – qui sait aussi se rebeller –, une réflexion sur la modernité à double tranchant et une méditation sur le bonheur.

Roger Béteille sait de quoi il parle. Car outre son activité de romancier, il est géographe. Professeur honoraire de l’université de Poitiers, natif de l’Aveyron, il est spécialiste du monde rural. Mais loin des livres savants, ses récits donnent à connaître les problématiques sans dogmatisme et avec une fraîcheur soutenue par une écriture ferme et poétique. En témoignent les premières lignes qui, d’emblée, portent le lecteur vers le récit :
Bleu très haut. Simplement bleu. Totalement bleu. Verts en deux touches : émeraude sourde le long de la rivière, céladon clair dans les prés caressés de lumière. Il est des lieux et des moments où le temps semble s’arrêter sur les couleurs qui composent le bonheur.

Monique de Carvalho 
(02/06/08)    



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Editions du Rouergue

336 pages - 17 €










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