Jean-Paul BIRRIEN

Arrête ton cinéma


La série des « Énigmes à Bourvillec » se distingue des séries habituelles qui sont liées à un, voire plusieurs personnages, évoluant à chaque fois dans des milieux différents : l'originalité de cette série est d'être liée à un lieu et de donner la vedette à une petite commune bretonne dans laquelle se déroulent ou se terminent les enquêtes policières.
Ce n'est pas la seule particularité de cette série qui se passe à la fin des années soixante et au début des années soixante-dix, une époque qui rend nostalgiques non seulement ceux qui l'ont connue, mais également ceux qui en ont entendu parler.
Autre particularité : l'écriture en double entrecroise les réflexions du personnage principal avec le déroulement de l'action et donne une saveur particulière à la lecture.
Du polar breton où l'humour et le suspense ne laissent aucun répit au lecteur.

(Présentation de l'éditeur)

Ce nouveau volume des « Enigmes à Bourvillec » poursuit avec brio le chemin ouvert l’année dernière avec Tournée de campagne.

L’action débute en 1974 à Dinard et, au bout de deux cents pages, nous emmène à Bourvillec pour la deuxième partie du livre.

Le personnage principal est un garçon de trente-sept ans plutôt excentrique, Charles Dubois, qui se promène sur la plage dans des costumes semblant sortir tout droit du cinéma des années trente.
Il vit seul avec sa mère, Olga, depuis la mort d’Henri Zylberstein, l’année précédente, à l’âge de 94 ans. Henri était le compagnon d’Olga depuis plus de vingt ans mais ils ne s’étaient jamais mariés. Il s’est occupé de Charles comme si c’était son fils, lui payant ses études à Paris au lycée Louis Le Grand, pour préparer les concours des grandes écoles.
Henri était très riche, la villa de Dinard est magnifique, les placards pleins de vêtements datant de sa période de gloire et le garage abrite une superbe Bentley 1930.
Mais sans mariage ni contrat, il se trouve un petit-neveu qui conteste l’héritage et les fonds sont bloqués jusqu’au procès. Olga noie son chagrin dans le champagne pendant que son fils balade les costumes d’Henri dans les rues de Dinard.

Charles a interrompu ses études pour des soucis de santé mentale. « J’ai un truc qui a dû se décrocher quelque part dans la tête. […] J’ai passé pas mal de temps à l’hôpital psychiatrique mais je ne suis pas fou […] Comme dit le docteur Stroudler, ma situation est à la fois négative et positive. Le négatif c’est que je souffre d'une déstructuration de ma personnalité, et que parfois je perds les pédales. Le positif, c'est que j'éprouve en permanence le besoin de me reconstruire une nouvelle personnalité. Mon problème c’est que je dois m'appuyer sur des modèles, et que ce n'est pas facile de trouver le bon.  »
Or depuis un mois, il l’a enfin trouvé ! Il a vu trois fois Gatsby le magnifique avec Robert Redford et Mia Farrow. Il a aussi adoré le roman. C’est l’histoire d’un homme qui s’invente un passé à sa dimension pour conquérir la femme qu’il aime.
Coup de chance, il voit sur la plage une jeune femme, Emma, qui pourrait tout à fait devenir sa Daisy. Charles-Gatsby sort le grand jeu pour la séduire…

Emma vit avec Freddy, un type pas vraiment limpide, réfugié à Dinard après quelques ennuis, barman dans une discothèque, prêt à tout pour se procurer de l’argent…

Le premier moyen employé pour récupérer une grosse somme ne donne pas les résultats escomptés et le trio part en cavale à travers la Bretagne dans la Bentley, avec la collection d’armes de Charles, en semant des cadavres dans leur sillage.

Charles s’identifie surtout à Gatsby, bien sûr, mais de temps à autre il pense aussi à Alain Delon dans Le Samouraï, Steve MacQueen dans Getaway ou Gene Hackman dans French Connection… Sa vie est enfin devenue passionnante, trépidante comme au cinéma !

J’ai aussi pensé à Freddy qu’avait déjà descendu un type, alors que moi je n’avais tué personne. Je me suis dit que je serais bien bête de ne pas en profiter, surtout que pour Arthur ça ne changeait absolument rien. Alors je lui ai mis une balle dans le crâne. Personne ne saura qu’il était déjà mort et ça me met à égalité avec Freddy. Sans compter qu’avec un mort, ça fait plus sérieux, pour le hold-up.

"L’écriture en double", propre à cette série, alterne le récit impétueux des aventures de l’impitoyable trio avec les chapitres en italiques où Charles devient le narrateur de son road movie, respectueusement amoureux d’Emma-Daisy à la manière de Don Quichotte pour Dulcinée.

On sourit plus qu’on ne frissonne, l’humour et la tendresse l’emportent sur la violence, la lecture est à la fois captivante et émouvante. Bienvenue à Bourvillec.

Serge Cabrol 
(24/06/08)    



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Noir & polar






Editions du Palémon
368 pages, 8 €


Pour visiter le site
de l'éditeur :
www.palemon.fr









Vous pouvez lire sur notre site un article concernant le premier volume des
Enigmes à Bourvillec :


Tournée de campagne





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