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Corine BLUE-BOSSELET

Séparable



Une étrange histoire d'amour – « Ils se retrouvaient dans leur chair, dans leur souffle et la vie reprenait pleine de manques, de rires et de cris aussi comme n'importe quel quotidien partagé. Ils mangeaient, dormaient, discutaient, faisaient l'amour, la gueule et la vie. Ils s'aimaient envers et contre toutes leurs réticences, leurs espérances et leurs trouilles respectives. » – et de rupture.
« Elle jouait, ses doigts caressaient les touches blanches et noires, à l'instar de leur histoire – période blanche, période noire – la blanche avait-elle valu deux noires ? Peu importe, elle jouait... Et je croche et j'accroche et je pause et... Silence. »

La narratrice au fil du texte, avec un chapitre pour chaque élément (viscères, sexe, yeux, nez, bras, mains, bouche, oreilles, langue, jambes, pieds, fesses, cheveux, épaules, dos, dents, torse, peau, pour finir bien évidemment par le cœur), ampute, découpe, tranche, hache menu, le corps de son amant. Un règlement de compte méticuleux envers l'aimé qui a trahi. Coup pour coup, blessure pour blessure. Sauvagement.
« Elle sut immédiatement que tout devait disparaître (…) Dessèche-toi mon Ange et que ton écorce s'effrite jusqu'à la poudre. Poudre aux yeux. Poudre de Perlimpinpin. Poudre toxique qui se dissolvait dans ton sang. Tes organes vitaux que tu réduisais par un poison mortel à une dépendance sans amour, je te les confisque à jamais. »

Mais la jeune femme agit sans précipitation et sans violence, avec délicatesse, avec émotion et non sans tendresse. Une passion d'une telle intensité ne retombe pas du jour au lendemain. « Lui jouer une dernière berceuse, l'enchanter à jamais ».
Un découpage scientifique et amoureux, mâtiné de souvenirs, qui n'est du reste pas, comme eux, sans sensualité. « Rondes tes épaules et douces aussi. Une courbe solide. Un carré apprivoisé. Repose-tête, repose-cœur. Les soucis enfouis, les envies naissantes, les chagrins circoncis, lieu de paix avant l'enserre des bras puissants, après l'empreinte du sexe juteux. Au milieu de l'étreinte. Aire de repos. Les guerriers de l'amour se posent et se regardent. Plus rien ne s'évalue. Tout est calme. »

Un humour grinçant aussi, noir, rageur, percutant, moitié thriller moitié Grand-Guignol, où le lecteur ne sait s'il est confronté à la folie d'une mante religieuse vengeresse ou au fantasme d'une amoureuse blessée.
Il faudra attendre le dernier chapitre (et de celui-ci, je ne révélerai rien) pour le savoir.

L'écriture est musicale, le découpage donne un rythme vif à ce scénario original bien maîtrisé et non exempt de jubilation.
Ce premier roman, écrit par une actrice-réalisatrice qui a collaboré aux Nuits fauves avec Cyril Collard et publié plusieurs pièces de théâtre, est une curiosité inattendue et fort distrayante.

Dominique Baillon-Lalande 
(30/08/10)   



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Editions JBZ&Cie

128 pages - 15 €