Filer droit


Luke n’a pas seize ans mais il est déjà un spécialiste du vol et particulièrement du crochetage des serrures.
« Il ne savait plus quand il s’était aperçu qu’il avait le don. Celui-ci semblait avoir poussé avec lui, comme les cheveux ou les boutons. Quoi qu’il en soit, Luke savait crocheter les serrures. N’importe quelle serrure.
Si on lui avait demandé d’expliquer comment faire, il n’y serait pas arrivé. […] Tout ce qu’il savait, c’était que, dès qu’il glissait cette lame dans une serrure, il avait l’impression de visualiser l’intérieur du mécanisme, comme si le bout de ses doigts envoyait des images vers des recoins cachés de son cerveau, qui les traitait et les analysait jusqu’à ce que les goupilles de la serrure cèdent sous la pression mesurée mais précise qu’il leur appliquait.
 »

Ce jour-là, il est occupé à forcer la portière d’un 4x4 garé dans un parking pour voler une paire de chaussures de sport haut de gamme oubliée sur la banquette arrière mais rien ne se passe comme prévu. A peine a-t-il mis la main sur son butin qu’il est éjecté du véhicule par deux hommes. Pas les propriétaires, mais des voleurs de voitures, des caïds de sa cité qui règnent par la terreur.
Ils bricolent les fils et mettent le contact mais au moment de filer tout se complique avec l’arrivée dans le parking d’un homme et d’une adolescente. Pas de chance, c’est justement le propriétaire du 4x4. Il se précipite pour barrer la route aux voleurs mais heurte un poteau qui lui sauve la vie. Par contre, la jeune fille, qui se trouve sur la trajectoire du véhicule, ne bouge pas d’un centimètre. Luke doit se jeter sur elle pour éviter qu’elle ne soit écrasée. La mère arrive à son tour et Luke prend ses jambes à son cou sans demander son reste.
Mais le père le poursuit et il a l’air de savoir courir, même sans ses chaussures de luxe.
En voulant franchir un mur pour échapper à son poursuivant, Luke se sent saisi par la cheville. Il s’accroche, il résiste, mais l’homme insiste et le mur s’écroule sur eux.

Avec ce premier chapitre au rythme haletant, nous voilà embarqués pour trois cents pages que beaucoup d’ados vont dévorer avec un grand plaisir.
Multirécidiviste, Luke risque un séjour dans un établissement pour jeunes délinquants dont les conditions de détention sont bien connues dans sa cité pour être particulièrement sévères. Toutefois, l’éducateur de Luke a proposé au juge une peine alternative susceptible de le faire réfléchir… Luke devra travailler pendant deux mois auprès d’un groupe de déficients visuels, et plus particulièrement… avec Jodi.

Le père de Jodi entraînait sa fille pour un marathon mais il a une jambe cassée par la chute de Luke et du mur à la fin de leur mémorable poursuite. Voilà Luke chargé de l’entraînement de la jeune sportive. Filer droit prend alors pleinement son double sens…

Des liens à la fois forts et complexes se tissent entre Jodi et Luke, ayant tous les deux une vie difficile pour des raisons différentes. Le lecteur découvre le quotidien d’une aveugle par le regard d’un jeune délinquant, un point de vue original et intéressant, et comprend peu à peu combien chacun des deux a besoin de l’autre.

Michael Coleman est l’auteur d’une trentaine de livres pour la jeunesse. Ce roman pour ados (son premier traduit en France) fonctionne très bien. On espère que d’autres titres nous permettront de retrouver l’efficacité de son écriture, capable de faire sourire autant que d’émouvoir.

Serge Cabrol 
(04/01/07)    



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Jeunesse




Michael Coleman
Filer droit


Editions du Rouergue
Collection doAdo Noir
312 pages - 13,50 €

www.lerouergue.com




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