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Alain DEFOSSÉ


Mes inconnues
Solange, Denise, Mado



L’absence peut devenir mère de légendes, voire des mythes, dans l’imaginaire d’un enfant ou d’un jeune homme. C’est précisément ce rôle que vont jouer Solange, Denise, Mado, trois femmes que n’a pas pu connaître le narrateur, mais qui, paradoxalement, vont occuper une place déterminante dans la construction de sa personnalité et de son écriture.

Trois figures féminines, trois personnalités différentes… Solange, une amie de la mère du narrateur, passionnée de danse, hante les bals, dans les années 58 : Pour moi, Solange c’est Sol, une femme qu’on appellerait Sol, c’est le soleil regardé en face, d’un coup de menton insolent […] Sol, et l’ange qui suit a de drôles de manières, une drôle de façon de regarder les hommes, de drôles de paradis à proposer. La seconde inconnue est en réalité la grand-tante du narrateur, emportée dans son adolescence par la tuberculose : Denise, c’est inexplicable, à presque un siècle de distance, sur une douzaine de photos à peine, la sachant maladive et fiévreuse et violoniste, condamnée, cernée et pathétique et faisant peine à voir, je l’entends rire, c’est inexplicable et c’est incroyable, mais j’entends son rire frêle comme son corps, presque inaudible. Ce n’est pas une voix, Denise, c’est un très doux rire intérieur. Enfin, Mado, galeriste, amie intime de la grand-mère du narrateur qui vit au milieu des tableaux, environnée de tableaux, la vie de Mado tourne autour des tableaux, les tableaux peuplent la vie de Mado.

Par le truchement des récits maternels, le narrateur, fasciné par ces visages féminins, rend finalement un vibrant hommage à ces femmes en retraçant leurs fragments de vie ; mais son objectif est double : retrouver l’origine de son imaginaire en évoquant le passé parfois mystérieux de ces femmes. La difficulté de l’écriture du récit d’Alain Defossé, traducteur et romancier, tient donc certainement à cette problématique, parfois ardue, mais intéressante, celle de faire le portrait d’une inconnue, son inconnue, pour tenter de se saisir, de se comprendre et de se raconter... Je suis [suivre ou être ?] le pas d’une femme dans la nuit.

Sylvie Legendre-Torcolacci 
(12/01/11)    



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Editions Phébus

160 pages - 11 €





Alain Defossé,
traducteur, est aussi l’auteur de plusieurs livres dont Dimanche au Mont-Valérien, Chien de cendres ou L'Homme en habit.