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Bret Easton ELLIS
Moins que zéro
Pour ceux qui ne connaissent pas l'uvre de Bret Easton Ellis, on leur conseillera
de commencer par Moins que zéro, roman publié en 1985 aux
États-Unis et traduit en France un an plus tard. C'est un livre à lire
d'une seule traite, comme on avale une bouteille de whisky, moins pour l'ivresse
que pour l'écœurement radical que provoque sa lecture.
De quoi s'agit-il ? Du témoignage de Clay, étudiant en vacances
pendant la période de Noël dans la banlieue friquée de Los
Angeles. Clay, comme ses copains, sous l'emprise permanente de la coke, dérive
de boîtes de nuit en fêtes organisées dans de luxueuses villas,
dont le bleu des piscines n'est pas sans rappeler les toiles de David Hockney.
Mais ce bleu est trompeur : il est vide, comme l'esprit de Clay qui essaye pourtant
de se raccrocher à son ancien amour de jeunesse sans y parvenir vraiment,
incapable qu'il est d'éprouver des sentiments, même si on le voit
parfois refuser de participer à un viol collectif ou être pris de
nausée devant la mort d'un coyote encastré dans le pare-choc d'une
voiture.
Clay est un symbole : celui d'une jeunesse dorée, dont les parents travaillent
à Hollywood, et qui entend bien faire ce qu'elle veut, puisque l'argent
achète tout, les corps comme la drogue, sauf bien sûr les sentiments
et l'amour en particulier. Ellis dresse ainsi le portrait d'une Amérique
inquiétante, où la valeur de l'échange se limite à
un deal, où l'on est prêt à se vendre pour rembourser une
dette de drogue, où le meurtre en direct filmé sous le manteau est
peut-être tout ce qui reste, quand le sexe ne suffit plus.
L'écriture du livre est à l'image de ce sombre tableau : sèche,
répétitive, plus axée sur des faits que sur l'introspection
de Clay ; façon de montrer combien la subjectivité des personnages
se trouve engluée dans un monde où règne les apparences,
celles des belles piscines, des corps bronzés des Californiennes et du
soleil écrasant de Los Angeles, ville cernée par le désert,
c'est-à-dire la mort et l'absence de rédemption.
Moins que zéro est donc un livre à part, qui dépasse
même l'objet dont il procède : son esthétique procède
d'un moralisme négatif, qui laisse pantois devant le nihilisme d'une société
où la valeur d'échange a remplacé l'humain.
Pascal Hérault
(24/04/11)
Pour visiter le blog de Pascal Hérault : http://pascalherault.blogspot.com
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Sommaire
Lectures
Christian Bourgois
Collection 10/18
250 pages - 7 €
Traduit de l’anglais
(États-Unis)
par Brice Matthieussent
Une nouvelle édition de Moins que zéro a accompagné en 2010, chez Robert Laffont, la parution de
Suite(s) impériale(s), qui en est la suite.
Bret Easton Ellis est né à Los Angeles en 1964.
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