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Elise FONTENAILLE
Chasseur d'orages
Herb, un adolescent de quinze ans, vit à Vancouver entre son père riche mais absent et sa belle-mère qui ne l'aime pas. Son père fait partie des loggers, « les assassins des forêts : ceux qui organisent le massacre de millions d'arbres splendides pour en faire des boîtes d'allumettes ou du papier toilette ». Quant à sa belle-mère, elle passe ses journées chez son chirurgien esthétique.
Alors, depuis que John, son grand-père foudrologue qui l'élevait, est mort – « c'était la belle vie, jusqu'à l'automne dernier où tout s'est écroulé » –, il cherche un sens à son existence. Il accroche au mur des photos d'orages ou de nuages.
Un beau matin, il va quitter la maison avec son passeport, l'argent de son anniversaire et surtout les cendres de son grand père pour rejoindre les « Lightning Fields », là où John voulait l'emmener, là où « chaque soir ou presque, une gigantesque fleur électrique tombe du ciel, une sculpture de lumière qui déchire les nuages noirs, avec un fracas d'enfer. ».
C'est une très belle histoire, toute en retenue et en suggestions. On suit, pas à pas les pensées d'Herb, le narrateur, et tout ce qui se glisse dans les interstices de ses réflexions – l'errance, l'épreuve du deuil et l'apaisement de la douleur – finit par s'imposer presque malgré lui.
Dans ce voyage, autant un pèlerinage qu'un parcours initiatique, il va rencontrer Mina derrière une lanterne-baleine, celle qu'il aurait dû construire avec John en souvenir de Moby Dick pour "la nuit des illuminares", comme un signe, comme un coup de foudre. Avec elle et ses deux amis, Blondie, une chinoise qui « fait des bonds en marchant comme si elle était montée sur ressort », qui mange du « fugu : le-poisson-qui-tue-s'il-est-mal-préparé » et Moon, un indien baraqué, qui détourne les yeux à chaque fois qu'il le regarde, sans doute à cause de son père, ils vont dormir dans une maison rouge aux meubles tagués en argent, parcourir 2500 kilomètres dans un van, manger des beignets dans un port de pêche, chercher deux noms gravés dans l'immensité des Joshua trees, se laisser surprendre par la nature grande et multiple, comprendre que la mort est une étape nécessaire – « dans la forêt, c'est pareil : les jeunes arbres se faufilent sous les branches des grands ; quand ils tombent, ils pourrissent doucement, et ça fertilise le sol, voilà... » –, que l'amour ouvre sur l'espoir et l'avenir : « Mina a fait un pas vers moi, elle a léché la goutte d'eau sur ma joue, et on s'est embrassé, tout doucement, longtemps - longtemps. »
Ils vont s'affronter, se chercher, s'aimer comme autant de modulations d'une quête de soi et d'une rencontre avec l'autre jusqu'au moment où « le ciel noir s'est déchiré avec un bruit terrible – un fracas de soie qu'on arrache, amplifié un milliard de fois - et la foudre est tombée sur les Lightning Fields », non pas une fin mais une renaissance où chacun, grandi et apaisé, pourra retourner à la vie.
Enora Bayec
(07/08/09)
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Jeunesse
Editions du Rouergue
Collection doAdo
96 pages - 6,50 €
Elise Fontenaille,
née en 1960, écrit des romans pour les adultes, dont le dernier, Unica ( Stock / Livre de Poche), a reçu le Grand Prix de la SF 2008 et le Prix Rosny. Chasseur d'orages est son premier roman pour adolescents. Un koala dans la tête paraîtra en septembre dans la collection Dacodac
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