Naïri NAHAPÉTIAN


Qui a tué l'ayatollah Kanuni ?



Naïri Nahapétian est journaliste à Alternatives économiques. Qui a tué l’ayatollah Kanuni ? est son premier roman. L’action se passe en 2005 en Iran, quelques semaines avant les élections présidentielles qui verront l’accession au pouvoir de l’ultra-conservateur – et cependant laïc et populiste – Ahmadinejad. Comme son titre l’indique, le livre s’ouvre sur l’assassinat d’un ayatollah particulièrement peu sympathique, juge tout puissant ayant conduit depuis vingt-cinq ans la répression des opposants en Iran. Tout le monde a de bonnes raisons de lui en vouloir, à commencer par ceux qui, en 1979, ont porté la révolution iranienne ; révolution, faut-il le rappeler, où islamistes, tiers-mondistes et marxistes se sont unis dans un même mouvement pour rejeter le régime du Shah, souverain fantoche d’un royaume vendu aux compagnies pétrolières américaines et à la CIA.

Bien entendu, le roman finira par répondre à la question posée par le titre, mais là n’est pas l’essentiel finalement. L’intérêt du livre repose sur les investigations de trois personnages : Narek, jeune français d’origine arménienne arrivé en Iran pour écrire un article et qui tentera d’éclaircir les raisons pour lesquelles sa mère – militante révolutionnaire – est morte vingt ans plus tôt ; Leïla Tahibi, féministe islamique – réclamant plus de droits pour les femmes tout en se réclament du Coran – et Mirza Mozaffar, éphémère ministre de l’économie ayant perdu toutes ses illusions.

A travers ces trois personnages, nous découvrons bien des aspects de l’Iran contemporain : un pays dirigé par une théocratie, mais riche de contrastes et de paradoxes… Téhéran a ses privilégiés, sa jet-set, ses quartiers chics… On peut porter un foulard et s’habiller divinement. Téhéran est une mégapole, où l’on construit à tour de bras, où la pollution n’a rien à envier à celle des Etats-Unis… Enfin, les minorités arméniennes et chrétiennes y sont respectées, chose impensable dans d’autres pays du Moyen-orient… Mais derrière ces paradoxes se profile aussi l’image d’un pouvoir corrompu, profitant de la manne gazière et pétrolière avec la bénédiction des ayatollahs…

En fait, le roman Naïri Nahapétian réside moins dans son intrigue policière, assez ténue et pauvre en péripéties, que dans ce tableau qu’elle nous offre de l’Iran contemporain. Du reste, était-il nécessaire de le placer dans une collection de polars ? Quoi qu’il en soit, une fois le livre refermé, on ne voit plus ce pays avec les mêmes yeux. Et c’est tant mieux !

Pascal Hérault 
(24/01/09)    



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Noir & polar










Editions Liana Lévi


280 pages - 17 €







Photo © Sophie Bassouls

Naïri Nahapétian,

est née en 1970 en Iran, pays qu'elle a quitté après la révolution islamique.