Collectif de poètes rwandais

Lettres ouvertes
aux pommes de terre



En 4ème de couverture nous est donnée l’explication suivante : « Rassemblé autour d’un projet culturel en poésie organisé en 2004 par le gouvernement rwandais (MIJESPOC) et la coopération francophone (animée par Thierry Mesas), ce collectif était constitué d’une quinzaine d’écrivains en devenir ou confirmés, autour de Jean Foucault. / Le groupement a constitué un véritable « laboratoire d’écriture », permettant d’aborder le monde intérieur des objets, de sites naturels, de réflexions sur le monde, de dépasser l’angoisse née de l’histoire… »

Il s’agit bien de cela, à travers les différentes productions apparaissent des questionnements de l’histoire récente du Rwanda ; ces productions prenant la pomme de terre comme interlocuteur, puisque, à toute lettre écrite à une pomme de terre est répondu par une lettre écrite par la dite pomme de terre. Pour que vous compreniez ce que je dis, voici un exemple :

Très chère patate.
(…)
Tout de même, je ne comprends pas le plaisir que tu as à vivre dans le noir avec tous ces morts. N’as-tu pas peur la nuit ? J’ai essayé de savoir pourquoi tu te cachais mais je me suis rendue compte de l’évidence : on ne te déterre que pour te tuer, après t’avoir dépouillée de la seule robe que tu possèdes.
Reste donc cachée car le jour pour toi est égal à la mort.

Amicalement.
Natacha

Et dans la réponse :

Ma chère intime Natacha,
Kibuye
(…)
Peut-être j’aime la solitude. Mais comme tu l’as évoqué dans ta lettre, mes amants ne me déterrent que pour me tuer et j’ai décidé de rester cachée dans les nuits sous la terre avec les morts comme tu me l’as suggéré d’ailleurs. Je te remercie sincèrement pour tes conseils.
A bientôt Natacha chérie,

Ta pauvre pomme de terre
Claude

L’ensemble est impressionnant par le fait que la pomme de terre est personnalisée, parfois femme, parfois homme, prenant le parti d’un regard sur la société des hommes : Mais je venais te parler aussi d’une tragédie que notre espèce vit depuis un siècle. Les hommes mangent leurs semblables maintenant et nous de la race des pommes de terre sommes en voie de disparition totale. Dans un autre texte, cela va plus loin encore dans la nomination de l’acte : Si tu pouvais savoir et reconnaître que cela porte un nom : violation des droits des tubercules. La majorité des textes sont sous forme de lettre, certains sont en poème. La lecture de ceux-ci est vivante, passant de questions graves à l’humour, telle cette réponse à Monsieur le délégué principal du Groupement Rustique Ibirayi ; ou la réponse de la pomme de terre starlette.

Merci à Jean Foucault, l’instigateur de ce travail, pour la qualité des textes, ainsi que pour les photos qui les accompagnent, et qui, regrettant que cet ensemble ne puisse pas paraître au Rwanda, s’est décidé à l’éditer lui-même.

Gilbert Desmée 
(27/09/08)    



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Poésie










Editions Corps Puce
Collection
Liberté sur parole

70 pages - 8 €


Editions Corps Puce
27 rue d’Antibes
80090 Amiens