Retour à l'accueil du site






Anna JOUY

Une enveloppe silencieuse

Je marche sans but puisque j’espère

Derrière la porte se tient une mort quêteuse,
Chantant pour moi le mois de mai.
Une mort avec au cou des mains palmées serrant
Quelques algues sifflantes.

En prose ou vers libres, sans titre, sont les poèmes de cette enveloppe silencieuse, comme une chair, une carapace qui s’est tue. Il faut dire que la poète avertit.

J’aimais parler de la mort
Je portais des fagots d’ombre.
Et la nuit dormait dans le fond des armoires
Et encore toujours.
Mais la mort s’est mise à m’aimer. Elle m’a donné sa robe.
Elle réclame l’oraison, elle veut que je parle d’elle
Elle a revêtu tous mes mots

Et je trie parmi l’éclat d’un peu de lumière à tenir le ciel.

Les lettres, les mots ont bien revêtu la robe noire du deuil et avec eux, silencieux, s’organise le poème, le demain.

C’est dehors, le brasier fertile. Des étendues de mort et sous la cendre, les futurs chevaux, les insectes rampant.
Je ne sais plus, j’oublie que j’ai prédit ces douleurs en les épelant.
J’ai visité le futur, les boutiques du malheur.
Je suis encore des phonèmes hurleurs, de l’haleine qu’on mélange en aimant. Mais demain ne ressemblera pas à mon visage, bien sûr que non, demain aura des traits fins comme le cil d’un verbe.
Demain n’aura que le tain froid des très anciennes vies.
On ne fera plus d’enfants parmi les pierres, ce seront des montagnes à naître.

Ma cendre déjà recouvre les fleurs, j’ai mangé l’avenir.

Il est vrai que lorsque l’on vieillit, à demain fertile, on rajoute, « peut-être », on a l’impression d’avoir « mangé l’avenir ».

Poèmes à la beauté funèbre, fleurs noires qui se baladent dans le monde par monts et par vaux, Une enveloppe silencieuse dit le sombre moment où tout se tait, nous enveloppe jour après jour comme une araignée momifie.

Michel Lansade 
(16/05/24)    



Retour
sommaire
Poésie







Anna JOUY, Une enveloppe silencieuse
Alcyone

(Janvier 2024)
72 pages - 18 €