Dans Goodbye Papa !, Taï-Marc Le Thanh décline le même thème, avec humour et tendresse. Ici, c’est le père qui est tombé dans le coma depuis dix-sept mois et ce n’est pas le régime politique qui a changé mais la famille qui a explosé. Alex, 16 ans, va essayer de recoller provisoirement les morceaux.

Le livre commence sur le constat du médecin et les mensonges d’Alex.
« La bonne nouvelle, annonce le médecin dans un demi-sourire, c’est que votre père est sorti du coma. » La mauvaise nouvelle, c’est qu’il est malade. « C’est une maladie rare, et je crains que mon diagnostic ne soit sans appel. Il doit lui rester trois mois à vivre, tout au plus. Mais ce sera trois mois où il pourra sortir de cet établissement. »
« – Personne d’autre de votre famille ne pouvait vous accompagner ?
– Ma mère est à l’étranger, ma sœur passe un examen, mon frère à la grippe, et ma grand-mère ne se déplace plus qu’en fauteuil roulant. 
Une phrase, quatre mensonges c’est peut-être mon record. »
Il en rajoute un en disant qu’il est majeur. À deux ans près…

Dès les pages suivantes, on mesure l’ampleur des mensonges.
La mère est partie avec Jérémie, un ami du père
Myriam, la sœur ainée, est en prison pour braquage.
Tony, le frère, est devenu Tanya.
Et la grand-mère est morte.

Heureusement Alex a un ami, Salomon, soixante-dix-sept ans, psychologue pour enfants, maintenant à la retraite. C’est à lui qu’Alex continue de se confier comme il le faisait quand il avait sept ans.
En sortant de l’hôpital, après l’entretien avec le médecin, Alex a filé chez Salomon pour partager et digérer les dernières informations.
Pour supporter tout ça, Alex s’accroche à un souvenir d’enfance, quand la famille était unie. Pendant des vacances, leur voiture est tombée en panne sur une route espagnole, et un violent orage a éclaté.
« Le paysage désertique s’est transformé en un gigantesque champ de boue. La pluie sur la tôle produisait un vacarme épouvantable. Bien à l’abri dans la voiture, mon père a émis un petit rire. "On est bien là", a-t-il dit. Il n’y avait aucune pointe d’ironie dans sa déclaration On était effectivement bien. Car nous étions ensemble. »
« J’aimerais retrouver cette sensation. »
« Il ne lui reste que trois mois selon le médecin. Trois petits mois. Moins de cent jours et je voudrais lui offrir une ultime joie. Ce moment que nous avons vécu en Espagne.
Je vais organiser un repas. Un repas où nous serons réunis tous les cinq, comme dans le passé. Avant que cette tempête de merde ne s’abatte sur notre famille. »
Salomon ne cherche pas à le décourager. « Tu vas y arriver. Tu vas réussir à surmonter cette épreuve. »

Comment va-t-il s’y prendre ? C’est tout l’enjeu du livre et on ne s’ennuie pas une minute. Les rebondissements ne manquent pas pour convaincre et réunir tous les membres d’une famille aussi éclatée. Pour la grand-mère décédée, évidement, c’est plus difficile, mais une bonne comédienne pourrait faire l’affaire. Le père sera-t-il dupe de toute cette mise en scène ? Suspense…

Alex est un personnage lumineux, plein d’énergie, que le lecteur a beaucoup de plaisir à accompagner dans ses initiatives audacieuses comme dans ses moments de découragement. Malgré tout, il sait qu’il peut compter sur l’appui de tous et c’est une bonne leçon de vie. L’union fait la force…

Serge Cabrol 
(02/09/24)