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Loriano MACCHIAVELLI

Les jours de la peur


« Au volant, Felice Cantoni, agent de son état, fume sa première cigarette de la journée. Qui est aussi la dernière : il y a trois semaines, le toubib lui a dit que deux cigarettes par jour c’est déjà trop pour son ulcère. […] À bord se trouve aussi Sarti Antonio, sergent de son état. Lui ne fume pas, n’a jamais fumé, mais cumule tout de même colite et ulcère. La colite, surtout, ne le laisse jamais en paix. Y compris maintenant. Il donnerait une heure supplémentaire pour des gogues. »

À Bologne, dans les années 70, la voiture 28, commandée par Sarti Antonio, est envoyée faire barrage autour du centre de transmission de l’armée qui vient de sauter faisant quatre morts.
Sarti, le personnage principal récurrent d’une série de romans (et même de séries télévisées) est très connu en Italie. Son auteur, dans une présentation humoristique, rappelle le contexte de l’écriture de ce polar sorti en 1974 : Bologne dans "les années de plomb", toujours entre assassinats et attentats.

« Et tu le sais que Pasquale Nunno a calanché ?
Il ne répond pas.
– Tu le sais ?
Le sergent Sarti Antonio se jure qu’à peine cette histoire terminée il va se chercher un autre boulot. Promis juré.
[…]
Foutez le moi au gnouf ! Tous au gnouf ! »

Mais voilà que Raimondi Cesare, l’inspecteur chef qui fait une théorie fumeuse à chaque élément de l’enquête, impérial, les libère tous. Tous sauf Rosas, anarchiste, seul suspect valable selon lui, car l’attentat c’est forcément "un rouge" qui en est l’auteur.

Il se trouve que Sarti Antonio ne croit pas à la culpabilité de Rosas, que pour diverses raisons ça ne peut être lui Il va le voir en prison.
« – Je veux lui prouver [à l’inspecteur chef] que s’il y a quelqu’un qui n’entrave que dalle, c’est lui… Saloperie de colite.
Il continue de se masser le ventre en silence. Rosas s’est mis à siffloter un concert de son cru puis :
– Écoute-moi bien et arrête-moi si je me trompe. Felicita t’a raconté que je l’aurai rattrapée après l’explosion, alors qu’en fait c’est elle qui m’a rattrapé… »
Et voilà que du fond de sa cellule, le suspect numéro un va plus ou moins diriger l’enquête.

Les jours de la peur est un polar qui joue avec le genre : personnages typés presque caricaturaux enquête dirigée par un détenu, héros toujours entre deux toilettes, argot qui est plutôt celui des années 50… Il produit un effet comique dans un contexte pas comique du tout, « les années de plomb », avec l’ambivalence de ces années, à travers un personnage qui a été soldat de la République de Salo et résistant.

Un polar qui fait sérieusement rire comme une comédie à l’italienne et j’espère qu’on aura la suite des aventures de Sarti Antonio dans cette nouvelle collection, Train de nuit, que ce livre inaugure aux éditions du Chemin de fer.

Michel Lansade 
(01/07/24)    



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Noir & polar







Chemin de Fer

Collection Train de nuit
(Mai 2024)
192 pages - 19 €

Précédé d'une lettre de l'auteur à son personnage écrite pour cette édition.


Traduit de l’italien par
Laurent LOMBARD










Loriano Macchiavelli,
né près de Bologne en 1934, est l’auteur de nombreux romans policiers, notamment une vingtaine de volumes de la série ayant pour héros
Sarti Antonio

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