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Alexandre ROULIN et Christine MOHR

Ma vie de chouette
Moi, dame Blanche, pas si différente de toi


Si vous voulez tout savoir sur la chouette effraie, sa vie et ses mœurs, tout en vous amusant, c’est le livre qu’il faut lire. Alexandre Roulin a passé quarante ans de sa vie à les étudier. Il nous livre ici le fruit de ses observations et ses conclusions ont de quoi nous étonner.

Comment et à quelle époque ces chouettes ont colonisé le monde, comment ont-elles rejoint les îles alors qu’elles n’aiment pas voler au-dessus de l’eau ?

On sait qu’elles chassent la nuit mais que font-elles de leur journée, quand et comment dorment-elles ? Pourquoi certains rapaces sont devenus nocturnes alors qu’initialement ils étaient diurnes ?

Comment peut-on trouver un campagnol la nuit dans les hautes herbes ? C’est l’ouïe qui lui permet de capturer des souris vivantes et en mouvement. Son ouïe est meilleure que celle du chat ou d’un chien, dix fois meilleure que la nôtre. Nous avons tous vu les chouettes tourner la tête à l’extrême pour suivre un mouvement. « Elle réussit ce prodige de contorsionniste grâce à ses 14 vertèbres cervicales, alors que nous n’en avons que sept. »

Comment les chouettes luttent contre le froid ? Leurs pattes sont nues (contrairement au hibou moyen-duc au « pantalon emplumé ») et leur plumage peu fourni, alors dès que la température descend sous 23°, elles accélèrent leur métabolisme pour se réchauffer. C’est pourquoi elles se réfugient dans nos maisons.

Pour savoir de quoi se nourrit la chouette effraie et où elle va chercher sa pitance, il suffit de dépiauter leurs pelotes de déjection. Ces pelotes « sont la porte d’entrée de la vie cachée de la chouette. » Campagnols des champs, rats des moissons, musaraignes aquatiques. Son menu est varié et son aire de chasse étendue. Un mâle équipé de GPS cumulait 70 km par nuit de vol. Les chouettes trouvent leur nourriture dans les jachères, les prairies, les champs céréaliers, les lisières de forêt.

Nous pourrons tout savoir sur la vie amoureuse des chouettes effraies, comment le mâle fait sa cour, la fidélité des couples, le nombre d’œufs par couvée, à quel âge la femelle peut être mère. Des tests de paternité vont révéler de rares cas de bigamie.

Au-delà de ces éléments précis, documentés, chiffrés sur la chouette des clochers, l’auteur dévoile l’intimité de sa vie de chercheur. Passionné très jeune par les oiseaux, il déclarait à l’âge de 10 ans qu’il serait plus tard ornithologue. Il raconte les heures d’observation, de traque, en pleine nuit bien sûr, les enquêtes dans les musées d’histoire naturelle du monde entier. En vingt ans, « j’ai mesuré 11 103 chouettes dans 155 musées. »  L’analyse des pelotes qui puent et dégagent une tonne de poussière mais recèlent pour lui une poésie qu’il sait nous transmettre. « Je casse en deux la première pelote et, oui, ils sont là, tout blancs et reluisants, un fémur, un second, plusieurs vertèbres et là, les deux globes remplis de poils, le bijou ripoliné, un crâne qui brille de mille feux. Un muridé, je dirais une souris de maison à première vue. » Grâce à sa patience et sa détermination il dépiaute 78 330 pelotes. Ses difficultés pour effectuer les calculs statistiques, l’aide de ses amis aux moments décisifs. Il doit reprendre des études, intégrer l’Université. La répercussion des grands progrès techniques sur son travail ; le GPS en 2015 qui lui permet de suivre la chouette dans tous ses voyages. Ses hypothèses de recherche et ses calculs, ses relations parfois compliquées avec les chercheurs reconnus. Le tout coécrit avec humour avec Christine Mohr qui replace la chouette dans l’histoire des superstitions et rend le livre très accessible pour un large public.

Nadine Dutier 
(21/06/24)    



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Lectures








Alexandre ROULIN et Christine MOHR, Ma vie de chouette
Salamandre

(Juin 2024)
176 pages - 19 €










Alexandre Roulin,
ornithologue et professeur de biologie à l’Université de Lausanne (Suisse), côtoie et étudie depuis plus de 40 ans la chouette effraie du point de vue écologique et évolutif..




Christine Mohr,
professeure de psychologie à l’Université de Lausanne (Suisse), est spécialiste de l’analyse des comportements humains et des superstitions. Elle étudie notamment les mécanismes des croyances populaires dont sont victimes les animaux sauvages.