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Stéphanie CLAVERIE


L'homme qui n'a pas inventé la poudre



Sébastien est un innocent assez singulier qui, depuis le décès de sa mère, vit avec son père René sur l'île d'Oléron. Un être simple qui ne comprend pas pourquoi les autres courent après un ballon,  un garçon (autiste ?) qui ne parvient pas à retenir les tables de multiplication et que l'école a vite considéré comme débile et mis au fond de la classe. Lui pendant ce temps regarde Lili et rêve de l'embrasser.

Le garçon n'est pas un violent et n'a jamais fait de mal à personne. On a rarement vu le jardin public aussi bien tenu et fleuri que depuis qu'il s'en occupe, embauché à mi-temps par la mairie.
Mais si le jeune homme (puis l'adulte) est plus que consciencieux et ordonné dans son travail et qu'il canalise ses angoisses avec un emploi du temps millimétré, il a pour gros défaut de ne se vivre que dans l'instant et d'être incapable de faire semblant. Des handicaps lourds pour une vie sociale formatée.
Bref, sauf à son père, homme de bonne volonté qui l'adore, à Barbara, la jeune infirmière rebelle devenue vendeuse de chaussures suite à l'accident de son fils unique qui pourrait y perdre définitivement l'usage de ses jambes, à la vieille Simone qui partage son goût des fleurs, Sébastien fait peur. L'anormal ne pourrait-il pas s'avérer un jour dangereux ?

Pierre, éducateur, qui le sait capable d'autonomie, l'accompagne et aide René à moins le surprotéger. « Jour après jour, à la Salicorne, René a appris à accepter le sourire de Sébastien quand lui avait si peur. Sébastien a accepté la tristesse de René alors qu'il batifolait dans ses fleurs. Il a fallu pas mal de temps pour que les deux hommes accordent leurs émotions, harmonisent leur comportement. [...] Les jours de lune noire, René ne parvient plus à voir la face lumineuse de la vie, il ne voit qu'un fils demeuré. Ces jours-là, Pierre détourne l'attention de René, met le ''demeuré'' à distance, aide le vieil homme à reprendre le cours de sa vie. »  

En périphérie, les histoires de vie d'Yvette (la mère) et René, de Lucas l'accidenté et sa copine paralysée du centre de rééducation, de sa mère la lumineuse Barbara, viennent croiser la route de cet étrange « enfant » qui jamais ne connaît le doute, croit toujours aux super-héros, et qui, à défaut de conformité aux conventions sociales, sait réveiller l'humain et l'appétit de vie en chacun d'entre eux. « Une beauté d'un autre monde. Des mots sincères, francs comme des nuages blancs qui font instantanément pousser deux grandes ailes dans le dos. »

Un livre sur la vie et la différence qui cache dans ses tiroirs plusieurs histoires d'amour, où le respect de l'autre prend beaucoup de place,  où le sourire et la joie pointent  au détour des difficultés quotidiennes, sans angélisme mais avec un optimisme et une santé à toute épreuve.  
Comme l'écrit Jean-Louis Fournier dans sa préface à propos du lumineux protagoniste au centre de toute cette histoire : « Il a trente-cinq ans l'éternel enfant. Faute d'avoir inventé l'eau chaude, il a inventé le rêve, l'oisiveté et pourquoi pas la poésie... »

 L'auteur, venue du monde de la TV, traite son sujet avec rigueur, simplicité et émotion et la fresque de personnages hauts en couleur qui l'habite ne manque pas de profondeur et de séduction.

Une parenthèse de bonheur et d'optimisme, sensible et hors tout cliché, fort salutaire dans cette période inquiétante et morose qui génère le repli sur soi et la peur.

Dominique Baillon-Lalande 
(14/01/16)    



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La Différence

(Janvier 2016)
176 pages - 17 €


Préface de
Jean-Louis Fournier








Stéphanie Claverie,
a travaillé pour de nombreuses émissions de télévision. Son premier livre, Une famille en noir et blanc, a paru en 2013.