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Mais qui parle ? Le regardeur imaginant les dialogues des personnages du tableau ? James Ensor lui-même ? Benoît Damon s’interrogeant sur l’érosion des corps par le temps ? Tous à la fois ! Et c’est là une réussite du livre. Dans une langue savoureuse, riche, précise, tous les univers, toutes les voix sont restituées avec des mots justes, des mots et des expressions qui eux aussi ont subi l’assaut du temps : « … je porte une souquenille vert pomme … c’est tout d’abord un piffre au visage comme taillé dans une motte de beurre … Il prétendra même se rappeler qu’une escarbille avait brûlé la manche de sa veste de ratine … enveloppé d’un macferlane aux boutons carrés…. » Une autre réussite du livre, c’est de faire dialoguer les personnages des tableaux en y introduisant des éléments de la vie bien réelle d’Ensor : la ville balnéaire d’Ostende, l’atelier du peintre installé dans le capharnaüm de la boutique de souvenirs et de masques de carnaval de sa mère, son père fantasque, les coups de gueule du peintre contre l’ordre établi. Là encore les mots pour désigner les lieux sonnent juste : « On passe comme une ombre devant les étals rincés de la minque silencieuse ». Retour à Ostende n’est pas non plus dénué d’humour et quelques clins d’œil à Proust (entre autres) rendent particulièrement savoureux un dialogue entre deux squelettes féminins devant un pendu : « Jamais tu ne pourras faire cattleya ou piquenotche avec lui. » ou bien encore deux squelettes côtes à côtes au fond du tableau… Retour à Ostende, un beau livre pour découvrir ou redécouvrir l’univers de James Ensor transcendé par Benoît Damon, écrivain profond à la langue savoureuse et amoureux des mots. Yves Dutier (12/09/16) |
Sommaire Lectures Champ Vallon (Septembre 2016) 208 pages - 17 € Benoît Damon, né à Genève en 1960, poète et écrivain, auteur de huit livres, travaille dans une bibliothèque universitaire. |
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