Retour à l'accueil du site





André FORTIN


Le chat Ponsard



Il est dangereux d'être honnête quand on travaille avec des escrocs et, inversement, il est dangereux pour des escrocs de travailler avec des gens honnêtes. Lucien Ponsard et son employeur en font ici la triste expérience. Comptable dans une entreprise immobilière et foncière, voilà qu'un jour, le 3 novembre pour être précis, Lucien Ponsard constate une erreur de TVA sur trois factures de la même société. Erreur bénigne, il suffit de téléphoner pour la faire rectifier. Mais, étrangement, il n'y a pas de numéro de téléphone sur la facture et pas trace de la société dans l'annuaire.
Comme il s'agit de la fourniture de vingt-trois arbres adultes pour un jardin public de la ville, le brave comptable décide de se rendre sur place pendant l'heure du déjeuner. Des pelouses, des bassins, des arbustes mais pas d'arbres adultes. De retour au bureau, il cherche, dans le dossier des marchés de travaux conclus avec la ville, des factures ayant un en-tête douteux et découvre alors d'autres entreprises fictives. L'ensemble représente une grosse somme.

Dès le lendemain, il expose au patron, Jean-Pierre Bernon, le résultat de ses recherches et reçoit cette étonnante réponse :
– Ne vous mêlez pas de ça ! Ce sont des choses qui vous dépassent. Rectifiez la TVA, passez ça par pertes et profits de manière que les comptes soient corrects. […] Soyez gentil, Ponsard, oubliez ça, faisons comme si vous ne m'aviez parlé de rien.
Offusqué, Ponsard, célibataire sans enfant qui vit avec son chat, préfère donner sa démission d'un geste noble d'honnête homme. Mais il en a trop dit et il en sait trop. Seule la mort garantit le silence.
Ce que Ponsard n'a pas compris ou a compris trop tard, c'est qu'il n'est qu'un rouage d'une machine qui dépasse les murs de l'entreprise, une machine à produire de l'argent pour ceux qui la font tourner et du pouvoir pour celui qui la dirige.

En haut de la machine, il y a Gilles Rupert, le sénateur-maire, qui a besoin d'argent pour renforcer son pouvoir, pour financer le parti, les réseaux et les campagnes électorales.
Rupert ne joue pas avec les risques, il les élimine. Et pour ça il dispose de François Cano, un ancien militaire rencontré en Algérie. Ils forment une bonne équipe tous les deux. Et Cano, lui, a ses hommes de mains, Ali et Léonard, qu'on a découverts dès le prologue du roman. Ali vole les motos et Léonard tient le pistolet. Une bonne équipe aussi ces deux-là pour un travail qui paie bien. Le pauvre Ponsard n'a aucune chance face à cette machine bien huilée…

Mais voilà, il y a parfois des grains de sable qui viennent gripper les plus belles machines. L'un de ces grains de sable s'appelle Louise Larcher, la secrétaire de Ponsard aux comportements étranges. Pour beaucoup, elle est carrément folle. Un autre grain de sable est le chat de Ponsard qui va nous révéler le degré d'humanité d'Ali. Et l'humanité, il n'y a pas pire pour détraquer les machines à produire de l'argent et du pouvoir.

C'est tout cela que nous raconte André Fortin dans un polar haletant, où tout s'enchaîne très vite, où l'on passe d'un personnage à l'autre de chapitre en chapitre, en découvrant leurs réflexions, leurs réactions, en se demandant qui sera broyé et qui s'en sortira. Un suspense mêlant des bons, des brutes et des truands, mais un suspense renforcé par la possibilité de la rédemption, où des pièces peuvent changer de camp au cours de la partie rendant le résultat totalement incertain jusqu'à la dernière page. Du beau travail, on en redemande !

Serge Cabrol 
(30/10/13)    



Retour
Sommaire
Noir & polar








Editions Jigal
248 pages - 18 €










André Fortin,

né en 1946, a été juge d'instruction, juge pour enfants et vice-président du tribunal de Marseille. Quand il écrit un polar, il sait de quoi il parle. Le chat Ponsard est son sixième roman publié chez Jigal.





Découvrir sur notre site
un autre roman
du même auteur :
Requiem pour le juge