Ces trois sœurs vivaient dans une grande maison, chacune avait sa chambre.
L’aînée, Eléonore, avait la chambre la plus belle. La seconde fille, Martha, occupait la chambre qui offrait la vue la plus intéressante. Et Jane, la plus jeune, prénommée « la petite » par ses parents, disposait de la chambre la plus exiguë, la plus mansardée, mais aussi celle qui permettait, grâce à sa lucarne, à la lune de veiller sur elle.
Jane enviait un peu ses sœurs, leur chambre, leurs robes, leurs sorties, leur vie de grande. Mais elle aimait aussi les moments privilégiés passés avec chacune d’elles ainsi que les droits que lui accordaient son plus jeune âge, comme celui de lécher ses doigts lorsqu’on mange de la mousse au chocolat.
Un jour, Eléonore partit de la maison. Martha prit sa chambre et Jane eut la chambre de Martha. Puis ce fut au tour de Martha de partir et Jane eut la plus belle des chambres.
Et la vie continua de passer. Jane grandissait.
Longtemps, je n’osai, à mon tour, quitter la maison. J’avais peur de laisser mes parents seuls avec les fantômes de leurs trois filles envolées… Pourtant, je savais bien que la prochaine à franchir cette porte, ce serait moi, cela s’était passé ainsi pour chacune, cela ne pouvait être autrement pour moi.
Jane, la narratrice, se souvient de tout avec une grande précision et nous raconte son quotidien de l’époque. On perçoit dans son récit la grande complicité entre les sœurs.
L’histoire, jolie et poétique, évoque les sentiments au sein d’une fratrie, les avantages et les inconvénients que l’on peut ressentir lorsque l’on est enfant, ce à quoi l’on aspire ainsi que ses nostalgies au fil du temps qui passe.
Les illustrations aux couleurs douces sont très belles et comme le récit, pleines de poésie et de délicatesse. Évoquant un univers anglais du début du 19e siècle, elles nous ravissent les yeux.
Voici un conte philosophique tout en nuances et délicat qui prête à réfléchir sur ce qu’est grandir.
Cécile De Ram