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Max GENÈVE


Le transformiste

Jean Jonassaint est un drôle de personnage et l’auteur nous présente ses aventures avec beaucoup d’humour et de tendresse. Max Genève semble s’amuser en écrivant et c’est un art délicat que pratiquaient, à leur manière, des auteurs comme Boris Vian ou Marcel Aymé. Il nous offre ainsi un roman plein de fraîcheur et de légèreté.

Jean Jonassaint est un quinquagénaire qui aime se déguiser, se glissant à la fois dans le costume et la personnalité de ceux qu’il choisit d’incarner. Cardinal, général, académicien ou prince indien, il s’offre régulièrement un amusant jeu de rôles. Il dispose ainsi de nombreuses identités, notamment une dizaine de métiers et même SDF, joueur d’orgue de barbarie ou coureur cycliste, n’hésitant pas à réaliser des fantasmes de l’enfance comme de régler la circulation en uniforme d’agent de police.

Côté vie amoureuse, il pratique le célibat en dilettante, partageant quelques moments de sa vie avec Mathilde, une agrégée d’histoire divorcée ou Anastasia une jeune employée de banque. Au fil de ses rencontres, il ne refuse pas quelques relations passagères comme la psychanalyste du deuxième étage qui l’a vu déguisé et le considère comme un sujet intéressant.

Il dispose de tout son temps, n’ayant pas à se préoccuper d’exercer un métier. Ses parents, « petits commerçants qui, sans devenir riches, ont su faire leur pelote  dans l’épicerie fine », « sont morts, hélas, de façon précoce dans le crash du vol Le Caire-Paris de sinistre mémoire, laissant à leur héritier le trois-pièces rue Raymond-Losserand, la jouissance de leur belle limousine et un bas de laine appréciable, mais sans commune mesure avec le montant des indemnités que me versa la compagnie d'aviation. » « Il est vrai que l'argent ne remplace pas nos chers disparus […] mais on a beau dire, j'ai vite compris, une fois le deuil avalé et leur disparition actée, que je venais de toucher le gros lot, moi qui n'avais jamais joué au Loto. »

Tout serait pour le mieux dans le meilleur des mondes si, parfois, l’incurable transformiste ne se laissait pas entraîner dans des aventures sans bien savoir où elles peuvent le conduire. Certaines sont sans conséquences dramatiques comme lorsqu’il accepte de travailler dans le cinéma avec des vedettes comme Nathalie Baye ou Omar Sy. D’autres présentent plus de danger lorsqu’il accepte, par exemple, de servir comme général dans les services secrets…

Évidemment, l’auteur joue avec la langue pour notre plus grand plaisir et ses saillies ne manquent pas de sel comme lorsqu’il évoque le goût de Jonassaint pour les voyages avec Mathilde : « J'aime son plaisir enfantin à découvrir, visiter, se laisser surprendre, mais ce que je préfère, c'est quand elle se laisse découvrir, surprendre et visiter, une exploration dont je ne me lasse pas. » Ou qu’il lui fait rencontrer dans un salon du livre un écrivain d’un certain âge : « Il portait le nom d'une ville suisse (à sa place, j'aurais pris un pseudo) et avait consacré son dernier roman à un épisode peu connu de la vie de Balzac. » Quand on sait que Max Genève est l’auteur du Voyage de M. de Balzac à Turin, on comprend mieux l’humour de cette rencontre…
Voilà donc un roman aussi distrayant que bien écrit, un régal pour les lecteurs en quête d’une légèreté qui n’encombre pas vraiment les rayons des librairies.

Serge Cabrol 
(04/08/17)    



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Lectures








Serge Safran

(Mai 2017)
208 pages - 16,90 €









Max Genève,
né en 1945, écrivain et scénariste, a déjà publié une trentaine de livres.

Bio-bibliographie
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