Où le vent te mène
Nous voilà plongés dans un univers inhabituel, le monde des Poilus.
« C'était un petit pays, un pays de glace et de roches. Les hommes ne lui avaient pas trouvé de meilleur nom que celui de "Pays du Nord". Inutile de le rechercher sur une carte : la contrée était si petite et si peu accueillante, qu'aucun géographe ne s'était donné la peine d'en dessiner le moindre détail. Et même, encore à ce jour, il semble qu'aucun visiteur extérieur n'y ait jamais mis les pieds. En effet, on n'en trouve aucune trace, dans aucun écrit connu, dans aucune bibliothèque, aucun reportage, aucune brochure touristique, dans le monde entier. Le Pays du Nord ne constituait vraisemblablement pas une destination très attractive.
De toute façon, ce petit morceau de terre, pas plus gros qu'un gros iceberg, n'abritait presque personne. Et pourtant...
Au Nord du Pays du Nord, à flanc de falaises, se trouvait tout de même un village. Agrippé à la glace comme un gros nid d'oiseau, il faisait face à l'océan et aux vents venus du pôle. »
Dans ce pays inexploré vivent donc les Poilus qui, pour résister au froid particulièrement dur, sont dotés d’une « pilosité hors norme »
Sol ne se sent pas à l’aise avec ses congénères. Il flâne beaucoup, renverse les paniers de poissons quand il rêve ce qui lui attire de nombreux reproches. Il est « Couveur officiel » chargé de s’occuper de la couveuse car les oiseaux qu’ils côtoient, les Aiguilles, nommés ainsi en raison de leur bec très effilé, pondent régulièrement leurs œufs et il faut surveiller qu’ils éclosent dans de bonnes conditions dans ce pays où il fait si froid. Un beau jour, un œuf éclot d’un oisillon très particulier et Sol, après un moment de surprise, va s’en occuper tout particulièrement.
« Piqué par l’indifférence générale, l’enfant décida d’être responsable de ce volatile non désiré.
– Tu n’es pas ordinaire, je le vois bien, tu es… extraordinaire ! Ne sois pas triste, je prendrai soin de toi… »
Après plusieurs années, comme il ne se sent pas vraiment intégré dans sa communauté, il décide de partir avec son oiseau qui a grandi, Diomède, qui lui aussi est assez maladroit. Il l’attache sur son dos car les tentatives de vol de l’animal ne sont pas vraiment suivies de succès. Dans le monde des Poilus, Sol n’était pas vraiment reconnu et Diomède était moqué par les Aiguilles, très efficaces pour attraper des poissons pour les Poilus, peuple de pêcheurs. Tous devaient être performants pour survivre dans un univers si inhospitalier.
Sol et Diomède, différents de ceux qui les entourent, choisissent donc de changer complètement de vie sans savoir ce qui les attend.
Le monde qu’ils découvrent nous est complètement étranger et nous ne retrouvons aucun repère habituel. Ils vont surmonter plusieurs dangers en se soutenant mutuellement et finiront par découvrir le monde des Cendrées, un peuple de souris et puis ensuite un autre monde...
Le cheminement de ces deux personnages prouve à quel point la détermination donne des ailes au sens propre comme au sens figuré pour avancer dans le monde, parfois hostile, trouver sa voie et l’humanité nécessaire à tous.
L’amitié entre un jeune homme et un oiseau est surprenante comme leur environnement mais ce roman, proche du conte, est une belle métaphore des étapes qui mènent à l’indépendance nécessaire pour prendre son envol dans le monde.
Brigitte Aubonnet
(10./01/18)