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C'est un régal de lire la novella qui a servi de trame à la tragédie de Shakespeare. Ce court récit, inspiré de l'histoire antique de Pyrame et Thisbé – Ovide est en vogue au XVIe siècle – et d'une nouvelle de Masuccio Salernitano qui se déroule à Sienne, intitulée Mariotto et Ganozza (prénoms qui ne peuvent passer à la postérité) est un récit enchâssé dans un autre. Le narrateur nous raconte que sur le chemin d'Udine, tout entier attaché à son chagrin d'amour, l’archer qui l’accompagne toujours dans ses déplacements lui propose, pour lui prouver la dangerosité de l’amour, de lui raconter une histoire arrivée dans sa ville : « elle vous rendrait la route moins ennuyeuse […] elle vous dirait comment trop d'amour conduisit deux nobles amants à une mort misérable et apitoyante. » L'homme était de Vérone, « agréable et fort habile de son métier […] c'était un fort beau conteur. » Et ce deuxième narrateur, évoquant habilement Éros, va nous livrer tous les ingrédients qui ont forgé le mythe : les Capelletti et les Montecchi ; leur féroce inimitié ; Roméo qui se rend à un bal des Capelletti, travesti, c'est carnaval ; le coup de foudre ; la scène du balcon ; le mariage secret par frère Lorenzo, ici confesseur de Juliette et grand ami de Roméo ; le bannissement de Roméo qui a tué Tebaldo, un Capelletti, les hostilités ayant repris entre les deux clans. On connaît la suite. À part quelques infimes variantes, on n'est évidemment peu surpris par le déroulement fatal des événements mais le récit coule, alerte, foisonnant de jolis dialogues et de détails dont notre dramaturge va s’emparer avec génie ! On est un peu frustré, bien sûr, de la rapidité des scènes, notamment celles du bal ou du balcon mais le long passage de la mort des amants dans le caveau des Capelletti est particulièrement beau et ténébreux. On comprend le succès immédiat de cette histoire mais l'auteur, s'étant inspiré de son malheureux amour pour sa belle cousine qui aurait brouillé les deux familles, ne saura pas qu'il est devenu célèbre d'avoir transcrit dans le marbre la légende des amants, Giuletta e Romeo, publiée l'année de sa mort ! Sylvie Lansade |
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