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Quand on rencontre Marion, elle ne sait pas encore que sa fille est partie. Elle est dans la rue, s’arrête devant une bijouterie, attirée par des boucles d‘oreille trop chères pour elle mais qui lui rappellent un geste d’Antoine. C’était il y a vingt ans. Il est parti depuis quatre mois. Quand elle rentre dans leur appartement, Timothée, le frère d’Adèle, est allongé sur le canapé, accaparé par son portable, un casque sur les oreilles. Elle entend de la musique dans la chambre d’Adèle malgré la porte fermée. Elle prépare le repas. C’est vers vingt heures qu’elle se dirige vers la chambre de sa fille. « Les doigts de Marion se rassemblent en un poing faible qui effleure la porte, une fois, deux fois. Puis il se raffermit et cogne plus vivement. Elle n'attend pas forcément de réponse, mais au moins un mouvement, le couinement de la chaise de bureau. Rien. Elle frappe à nouveau et tourne la poignée. La chambre est vide. Le lit a été fait. Les rideaux sont fermés et on dirait que la nuit est tombée avant l'heure. » La musique vient de l’ordinateur allumé sur le bureau. C’est peu à peu que l’inquiétude s’installe, au fur et à mesure qu’elle guette le retour d’Adèle qui ne rentre pas. Beaucoup de parents se reconnaîtront dans cette attente et les réflexions qui se succèdent pendant que les heures s’égrènent lentement. Elle finit par appeler Antoine qui passe chez elle pour essayer de la rassurer. Le lendemain matin, elle joint une ancienne copine d’Adèle, la seule dont elle ait le numéro, mais Johanna a déménagé à Lille et n’a pas vu Adèle depuis au moins un an. Ensuite, c’est le passage au commissariat, puis au lycée… Nous découvrons ce que Johanna, Sarah ou Chloé, certains professeurs ou le serveur du bistrot, savent et pensent d’Adèle, comment elle a beaucoup changé ces derniers temps. Et puis à la moitié du roman, le monde bascule une nouvelle fois pour Marion. Un attentat a lieu aux Halles, à Paris. Deux terroristes sont tués. Une complice, la compagne d’un des tueurs, est en fuite. Une caméra de surveillance a saisi son visage. Marion reconnaît Adèle… Astrid Éliard a un grand talent et beaucoup de finesse pour rendre compte du vécu complexe des adolescents. Dans son précédent roman, Danser, (chroniqué ici), on suivait deux filles et un garçon passionnés au point de vouloir intégrer l’école de l’Opéra de Paris. On y trouvait, comme ici, l’alternance des points de vue et cette écriture riche en observations, sensations, émotions, une écriture qui capte et restitue les détails, les petits gestes, les pensées fugaces qui révèlent tant de choses sur une personnalité, une écriture qui place le lecteur au cœur du maelström vécu par les personnages. La dernière fois que j’ai vu Adèle est un roman puissant, émouvant, qui pousse le lecteur dans ses propres réflexions. Une belle réussite qui rappelle que la rentrée n’est pas seulement commerciale, elle peut aussi parfois être littéraire. Serge Cabrol (04/09/19) |
Sommaire Lectures Mercure de France (Août 2019) 224 pages - 18,80 € Folio (Mars 2021) 240 pages - 7,50 €
Bio-bibliographie sur Wikipédia Retrouver sur notre site le précédent roman d'Astrid Éliard : Danser |
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