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Clément ROSSI


La dissonante


Tristan passionné par la musique depuis l’enfance est chef d’orchestre.
Un jour, lors d’une répétition du Tristan et Isolde de Wagner, un phénomène auditif étonnant se produit pour lui.
Annah, la soprano, a disparu brutalement. Sa doublure la remplace mais au fur et à mesure des répétitions Tristan l’entend chanter faux ainsi que l’orchestre.

Cela crée chez lui des sensations particulièrement désagréables et le rend de plus en plus irritable et odieux. Un chef d’orchestre a pour rôle de faire émerger le meilleur : « Lui dont les musiciens sont les instruments, il lui faut trouver la perle rare, le soliste qui répond à la moindre inflexion de sa baguette, qui comprend et exécute chacune de ses intentions, qui se vide de lui-même, devient la page blanche, la toile vierge de celui qui le dirige. De la même façon, il suffit parfois du bon chef pour révéler une voix qui, au premier abord, n’a rien de remarquable. C’est une connexion singulière, terriblement rare, presque de la télépathie. »
 
Il trouve l’orchestre et la chanteuse nuls alors qu’il n’était déjà pas convaincu par la représentation de cet opéra. En outre, il s’inquiète de plus en plus pour ses oreilles.

Il n’est pas loin de la retraite et, à soixante ans, il doit bientôt épouser Mathilde, chorégraphe de vingt-cinq ans sa cadette.
Il ne veut pas lui parler de cette nouvelle sensation d’entendre la musique désaccordée ce qui fait qu’elle comprendra de moins en moins son attitude.

Son comportement sera de plus en plus « désaccordé » lui aussi au fil du roman. Il a toujours été différent mais cela s’accentue nettement : « Parmi ses semblables, Tristan n'était qu'une absence. Absence de voix, absence de gestes, absence d'intérêt. À table, il était très difficile de le faire parler au-delà de quelques politesses rituelles et mécaniques. » Peut-être est-ce nécessaire pour un créateur ?

C’est un thème original qui nous entraîne dans le monde musical, les méandres d’un orchestre, les affres de la création collective et les angoisses liées aux problèmes de santé remettant en cause l’exercice d’une profession.

Le texte est bien rythmé et maintient le suspense sur le devenir de Tristan, dans sa perte du langage musical, en oscillant entre réalité, comportements très bizarres proches de moments de folie et certaines dérives qui semblent invraisemblables. Est-ce une métaphore du vieillissement avec la perte progressive de toutes nos capacités ?
C’est un premier roman très réussi.

Brigitte Aubonnet 
(30/10/19)   



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Gallimard

Collection Sygne
(Octobre 2019)
240 pages - 18 €




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