Ces carnets, sous forme de chroniques régulières, balayent les années de 2012 à 2017. Ils mêlent souvenirs personnels, rencontres littéraires, lectures et vie au quotidien. Ils sont très émouvants avec cette plongée dans le monde de la poésie et de la maladie qui s’est invitée dans la vie de Françoise Ascal. La lutte contre la souffrance est permanente mais accompagnée de l’écriture, de B., de ses amies et amis, de la nature, Françoise Ascal résiste. C’est un passionnant parcours d’écriture qui interroge sur l’art de vivre avec en soi « de la mort et de la vie ».

Beaucoup d’écrivain·e·s sont évoqué·e·s au fil des pages. « En dépit de mes réserves initiales, le dernier journal de Bauchau est exemplaire. Le vieillissement minutieusement décrit, ses parades, la volonté active de continuer à écrire tout comme l'acceptation de ce qui arrive. Un modèle de persistance et de sagesse. »

La prose poétique de Françoise Ascal pose un regard délicat sur le monde, sur la douleur, sur l’espoir, sur la création. De la douceur se dégage malgré la dureté de la souffrance qui dévore « l’être au monde ».  

Beaucoup de notes évoquent le rapport à l’écriture, au temps qui passe, à la vieillesse et à la mort qui rôde mais les éclats de bonheur du quotidien, à ne rater sous aucun prétexte, émaillent avec plaisir le texte pour montrer la force de vie au cœur de la poésie et de la nature en toile de fond.

« Venir au journal avec l'espoir de toucher un état d'ouverture. Que l'écriture advienne, avec sa part d'inconnu. B. dit "aiguiser l'outil". Une bonne métaphore serait aussi le fil à pêche. Venir au journal pour lancer l'hameçon dans l'obscur. »

« Est-ce que j'aurais les mêmes sensations face à la prairie si je ne savais pas que la lisière d'arbres correspond an lit de la rivière ? Est-ce que mon savoir projette sur les arbres quelques secrets, odeurs, mouvements, de telle sorte que j'intègre la rivière sans la voir ? »

C’est un moment de lecture très puissant qui déploie toute la richesse de la poésie des mots et le soutien qu’elle nous apporte pour nourrir les désirs de vie.

Brigitte Aubonnet 
(26/10/21)